Les start-up et scale-up belges n’ont pas atteint les taux de croissance attendus en 2022 – loin de là. En cause : des signatures différées ou des volumes plus faibles que prévu. La quatrième et dernière édition de la Scale-Ups Confidence Survey de Deloitte, l’enquête sur la confiance des scale-up , menée cette année en collaboration avec la société d’investissement flamande PMV, a livré son verdict : après le rebond enregistré à la fin de la pandémie (de 6,9/10 à 8,4/10), le niveau de confiance des scale-up est retombé à 7,9/10 en mars 2023.
Dans une année tumultueuse marquée par la guerre et ses effets sur l’inflation et les prix de l’énergie, le nombre de scale-up « (quelque peu) inquiètes » a triplé par rapport à 2021. En effet, les entreprises participant à l’enquête n’ont atteint que 60% de la croissance attendue en 2022. Le goulot d’étranglement le plus pressant a été le recul et le report d’activités et de signatures de clients, qui a dépassé l’acquisition de talents comme principal défi identifié par les scale-up en 2022. Néanmoins, plus de 70% des scale-up interrogées conservent une (grande) confiance dans leur capacité à maintenir ou accélérer leur rythme de croissance en 2023, notamment avec l’acquisition de nouveaux clients, des projets d’expansion sur de nouveaux marchés ou l’établissement de partenariats.
Entre mi-février et mi-mars 2023, Deloitte a interrogé des start-up et scale-up en Belgique et aux Pays-Bas sur leur trajectoire de croissance, les défis auxquels elles sont confrontées, leurs priorités, leur niveau de confiance et leurs objectifs futurs. En dépit d’un recul de 5 points de pourcentage du niveau de confiance après l’embellie significative enregistrée au terme de la pandémie, 4 entreprises sur 5 restent « très confiantes » ou « confiantes » concernant la trajectoire de croissance de leurs activités en 2023. Les secteurs les plus confiants sont les fintech et les services. Cette confiance se reflète dans un objectif moyen de croissance des revenus de 129% en 2023, en hausse de 5 points de pourcentage par rapport à la croissance attendue l’an dernier et de 60 points de pourcentage par rapport à la croissance enregistrée l’an dernier.
La croissance des revenus retombe à 60% des niveaux prévus en 2022
Alors que les scale-up se montraient encore optimistes en 2022 – les prévisions de croissance moyennes, tous secteurs confondus, s’établissaient à 124% –, leurs revenus n’ont en réalité progressé que de 70%. Certains secteurs ont cependant réussi à se montrer plus performants que d’autres : la croissance moyenne des revenus la plus élevée (136%) est ainsi à mettre à l’actif des scale-up actives dans le développement durable, suivies par celles actives dans l’électronique (89%). À l’avenir, ce sont toutefois les secteurs de la mobilité et de la durabilité qui devraient enregistrer les taux de croissance moyens le plus élevés, avec des projections respectives de 342% et 289%.
Roald Borré, Portfolio Management Director PMV : « Il n’y a rien de surprenant à voir les scale-up actives dans la durabilité, l’électronique et les fintech afficher les taux de croissance les plus élevés. Nous sommes toujours confrontés à une pénurie de semi-conducteurs qui pèse sur la production dans toutes les industries et le monde entier. Mais avec l’interdiction de voitures neuves à carburant fossile dans l’UE à partir de 2035, les constructeurs et les scale-up recherchent activement des solutions durables pour aujourd’hui et demain. »
Koen Vandaele, Managing Partner Ecosystems & Alliances Deloitte Belgique : « En matière de croissance des revenus, l’optimisme initial a fait place à un retour à la réalité : les taux de croissance réels demeurent 54 points de pourcentage en dessous des attentes. Les résultats de notre enquête sur plusieurs années montrent que les taux de croissance réalisés par les scale-up restent systématiquement inférieurs aux prévisions et sont lourdement impactés par les événements socio-économiques majeurs. Les effets de la pandémie et de la guerre ont confronté ces entreprises à d’énormes défis, mais elles ont néanmoins fait preuve d’une incroyable résilience et d’une grande agilité. De nombreux secteurs restent confiants et prévoient une nouvelle accélération de leur trajectoire de croissance en 2023. »
Principal goulot d’étranglement : le report d’activités et de signatures de clients
En 2022, le premier défi auquel ont été confrontées les scale-up aux Pays-Bas et en Belgique est la baisse ou le report d’activités ou de signatures de clients. Il est invoqué par 52% de participants, soit une hausse significative par rapport aux 43 % de l’an dernier, mais un recul par rapport aux 66% de 2020. Le recrutement de talents adéquats est leur deuxième préoccupation la plus pressante. Il arrivait en tête en 2021 et 39 % des participants y voient à nouveau un facteur crucial pour leur développement. Il est suivi par les cash-flows (33%), en hausse de 12 points par rapport à 2021, les défis opérationnels (24%) et les problèmes dans la chaîne logistique (21%). Alors que la perte ou le report de contrats existants arrivait en deuxième position (35%) en 2020, il est relégué cette année en bas du top cinq (20%).
À la suite des événements de l’an dernier et des récentes turbulences dans le secteur financier, les scale-up ont également mentionné plusieurs nouveaux défis : 16 % d’entre elles ont par exemple pointé l’inflation comme principale difficulté. D’autres défis susceptibles de peser sur leur croissance, comme les prix de l’énergie, les modifications apportées au cadre réglementaire et la durabilité, sont moins mentionnés par les participants
La guerre des talents fait toujours rage
Alors qu’elles prévoyaient une augmentation de 39% dans l’enquête de l’an dernier, les scale-up n’ont finalement accru leurs effectifs totaux en équivalent temps plein (ETP) que de 29 % en 2022. Et 22 % des scale-up se préparent à un gel des embauches, une croissance nulle des effectifs, voire une réduction du personnel en 2023. En dépit de la croissance attendue des revenus en 2023, c’est particulièrement le cas dans le secteur de la mobilité, lourdement affecté par la pandémie et les perturbations de la chaîne logistique. Néanmoins, 78 % des scale-up prévoient toujours d’augmenter leurs effectifs, les sciences de la vie et la santé et la durabilité menant la charge. Une tendance alimentée par la hausse de la demande de soins de santé et de produits et services durables.
La guerre des talents fait toujours rage : 71% des participants à l’enquête signalent une pénurie de candidats qualifiés. Laquelle provoque une hausse des attentes salariales, la deuxième difficulté significative à laquelle sont confrontés 48% des répondants. Par ailleurs, 22% des participants citent un manque d’expertise ou de capacité de recrutement, ce qui révèle que certaines scale-up pourraient avoir besoin d’améliorer leur stratégie d’embauche ou d’investir dans de nouvelles ressources pour les aider à recruter.
Bart de Vries, Partner Deloitte Pays-Bas : « Comme en 2021, la pénurie de talents pour certains rôles spécifiques et les attentes des candidats restent le principal obstacle auquel se heurtent les scale-up dans le domaine de la gestion des talents. Il est intéressant de noter que 7% des scale-up ont évoqué dans les commentaires le manque de diversité dans leur réservoir de talents, un sujet qui n’était pas apparu dans l’enquête de l’an dernier. Les leaders actuels en matière de talent sont plus attentifs à la diversité et à l’inclusion au sein de leurs effectifs, s’ouvrent aux talents nouvellement arrivés ou repensent leur stratégie de recrutement globale. »
2023 : acquisition de clients et accès à de nouveaux marchés
En 2023, la grande priorité des scale-up dans la réalisation de leurs ambitions de croissance reste l’acquisition de clients (82 %), suivie par l’exploration de nouveaux marchés (41 %), les partenariats/revendeurs (40 %), la montée en gamme (37 %) et la diversification et le développement de produits (36 %).
Quatre scale-up sur dix prévoient une expansion géographique de leurs activités. Parmi celles-ci, 30 % des scale-up ont l’intention d’étendre leurs activités en Europe, l’Amérique du Nord étant la destination préférée en dehors du Vieux Continent. Les entreprises belges cherchent toujours à s’étendre d’abord aux Pays-Bas, alors que les entreprises néerlandaises s’intéressent en premier lieu au Royaume-Uni. Les scale-up qui cherchent à s’étendre à l’Est restent minoritaires.
Le financement préoccupe davantage, comme la baisse des valorisations
Il s’avère que 72% des scale-up qui ont participé à l’enquête recherchent des financements supplémentaires, principalement entre 1 et 3 millions d’euros. Les principales sources de financement envisagées sont le financement par fonds propres levés auprès de nouveaux investisseurs (52%), les subventions publiques (46%) et le financement par fonds propres levés auprès d’actionnaires existants (35%). De manière générale, les scale-up sont confiantes dans leur capacité à obtenir les financements nécessaires, en particulier dans les sciences de la vie et la santé, l’électronique et la mobilité. Cependant, un quart des scale-up qui opèrent dans les médias et le divertissement se disent préoccupées par leur capacité à obtenir les financements dont elles ont besoin.
Quelque 62% des scale-up affirment que le climat économique actuel impacte négativement la valeur de l’entreprise. Une baisse des valorisations peut avoir des implications significatives pour les scale-up : accès réduit au capital, difficultés accrues à attirer des investisseurs, déclin potentiel des performances opérationnelles globales… Cette tendance s’observe dans la plupart des segments en 2022.
Les priorités en matière d’investissement pour 2023 sont l’amélioration de l’offre de produits et de l’expérience utilisateurs. Ainsi, 83% des scale-up interrogées comptent investir dans de nouvelles fonctionnalités produits, et un tiers dans la gestion des données et le cloud. La transition numérique et les investissements technologiques resteront en tête des priorités des scale-up belges et néerlandaises durant l’année à venir.
Source: dans le cadre de la Scale-Up Confidence Survey, Deloitte a sondé 279 scale-up : 214 scale-up belges et 65 scale-up néerlandaises. Environ 80 % des participants occupaient le poste de CEO ou de cofondateur de leur organisation respective, et la majorité des scale-up opéraient dans un environnement B2B. Les entreprises participantes étaient actives dans les secteurs les plus divers, les plus nombreuses opérant dans les logiciels pour entreprises, les sciences de la vie et la santé, et les fintech. La plupart des participants travaillaient pour des organisations employant 10 à 50 collaborateurs à temps plein et générant un chiffre d’affaires supérieur à 1 million d’euros.