Editorial – Des entreprises en manque de solidarité, dont le sort dépend d’egos surdimensionnés.

Nos entreprises sont 100% identiques à notre société. Elles reproduisent des mécanismes semblables, sont traversées par les mêmes idées et ’torturées’ par les mêmes contradictions. Ainsi, aujourd’hui, il est frappant de constater à quel point elles souffrent d’un manque cruel d’esprit solidaire dans leur fonctionnement quotidien. Et dans le même temps, elles confient les manettes à des dirigeants boostés par l’ego, pour lesquels le principal carburant demeure la réussite personnelle et l’obtention des 15 minutes de célébrité promises jadis par Andy Warhol. Est-ce compatible? Nous le pensons et voici, une fois n’est pas coutume, trois raisons d’y croire.

Un phare dans la nuit ?
Un des axes forts sur lesquels chaque manager est invité à travailler – que cela lui plaise ou non – concerne le développement de sa visibilité. Il ne suffit plus de ‘faire’, ni d’accumuler les résultats. Encore faut-il le faire savoir… La place de la communication (que certains appellent ‘politique’) est centrale aujourd’hui pour installer la crédibilité et représenter une source d’inspiration pour les équipes. L’exemplarité doit être soutenue par des efforts nombreux et continus en matière de présence et de pédagogie. Le manager doit communiquer en permanence pour que chacun.e comprenne le sens de la marche et se sente investi dans le projet collectif. Bien sûr, la démarche est souvent et rapidement assimilée au développement d’un culte de la personnalité, imaginé pour assurer les perspectives de progression et de carrière de son sujet principal. Appelons cela la rançon de la gloire… Car, avant tout, cette démarche remplit bel et bien une attente forte: dans nos entreprises, comme dans notre société donc, nous avons besoin de héros du quotidien qui fonctionnent comme des points de repère et de rassemblement. Ceci explique au moins en partie pourquoi des egos survitaminés émergent dans nos entreprises: ils/elles répondent de façon logique à la demande générale tout en y trouvant un terrain d’expression de leurs talents et la reconnaissance de ceux-ci par la foule en délire. Tout le monde est content… ou presque.

Des intérêts pas toujours convergents
Dans cette alchimie subtile entre des leaders assoiffés de lumière et les troupes en quête d’inspiration, il y a un danger quasi permanent. Celui-ci se trouve dans la ‘difficulté’ de prendre les bons arbitrages entre les priorités individuelles et collectives. Dans l’idéal, les intérêts de l’entreprise et ceux de ses dirigeants devraient toujours se rejoindre. Mais la réalité est souvent perverse. Nous pourrions convenir que l’intérêt collectif (voire général) devrait primer de manière systématique. Et le meilleur moyen de garantir ce principe consiste sans doute à éviter la concentration des prises de décision aux mains d’un et un seul monarque éclairé. Injecter du participatif à l’échelon décisionnel dans l’entreprise – alors que celle-ci n’est pas un lieu de démocratie – constitue certainement un enjeu majeur en matière de gouvernance… Particulièrement dans cette période où règne la confusion des statuts – nous reviendrons sans doute sur les avantages et inconvénients des managers agissant au quotidien via des sociétés de management – et la multiplication des conflits d’intérêts qui en découlent.

Le temps et la modestie finalement
Au fond, le luxe ultime que nous devrions nous offrir, c’est le temps! Les managers n’en ont pas assez dans une journée, ils n’en ont pas assez dans une année pour imprimer le cours des événements et avoir un impact positif et (surtout) durable. Or, la solidarité, c’est peut-être essentiellement une question de temps disponible pour les autres (et un peu pour soi aussi, ne l’oublions pas). Prendre du temps ensemble, s’épargner mutuellement les tracas, gagner du du temps par l’efficacité collective… Nous sommes lancés désormais dans une course ‘contre’ le temps, pensant peut-être que nous serions capables d’en inverser le cours. En vain, c’est évident. C’est sans doute une question de modestie à acquérir pour des managers convaincus que cette dimension est élastique, comme toutes les autres. Ce n’est pas le cas.
Le temps passe. Les managers et leurs egos aussi. L’invitation est lancée donc afin de privilégier pourquoi pas l’élégance et la discrétion à la puissance et à la gloire. Soyons donc modestes… et inspirants.

Jean-Paul ERHARD

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