Dirigeants d’entreprise, patrons de PME, média généralistes… Tous nous posent systématiquement la même question, en affichant à la fois un air désabusé et une vraie curiosité face à cette énigme: qu’est-ce qui fonctionne vraiment actuellement en matière de gestion RH dans l’entreprise?
La question est pertinente. Elle trouve son origine dans la difficulté d’encaisser les ‘problèmes’ humains qui s’accumulent rapidement dans nos organisations. Autour de nous, il y a des gens qui ne veulent pas coopérer, des conflits latents, des départs fracassants, des talents déçus et d’autres décevants… Ce sont des réalités gênantes qui obligent les décideurs et les observateurs à s’interroger sur l’impact réel des initiatives RH et sur l’importance des moyens déployés en la matière. Comment pouvons-nous les rassurer ?
A force de regarder sans cesse le verre à moitié vide – en clair, les travailleurs qui décrochent, les équipes qui se déchirent et les organisations qui se plantent -, il est vrai qu’il n’y a plus grand monde qui croit encore qu’il est possible de donner de la joie et de l’énergie aux collègues. Mais faut-il pour autant laisser croire que gérer des gens est la plupart du temps un véritable calvaire? La réponse est non. Le People Management, ce n’est pas compliqué…(enfin, peut-être un peu tout de même)…
Beaucoup d’âmes en peine, encore tiraillées entre l’économique et le social
Privilégier la rentabilité ou l’intégration sociétale? Penser aux actionnaires ou aux travailleurs? Le choix entre l’une des deux dimensions reste trop présent dans les esprits de celles et ceux qui ont la charge des effectifs. Le principe est pourtant tellement simple: il ne faut jamais choisir entre l’une et l’autre.
La nature du métier consiste justement à (ré)concilier les deux en permanence. À trouver l’équilibre, certes instable, entre la performance économique (dont financière, évidemment !) et l’épanouissement des individus et du collectif.
C’est justement parce qu’il est instable que l’on a besoin que quelqu’un.e s’en occupe. Il y a un travail continu à mener qui alterne entre la pédagogie, l’accompagnement et la persuasion pour que chaque collègue puisse trouver son compte dans le contexte qui nous réunit. En refusant de choisir entre les impératifs économiques et la responsabilité sociale, nous ne faisons que soutenir une ambition raisonnable, celle qui consiste à prendre une part active au bien-être de l’ensemble.
‘Gérer des gens, c’est vraiment ce qu’il y a de plus difficile…’ (soupir)
Ne devrait-on pas bénéficier d’une prime de pénibilité lorsque l’on exerce le métier de responsable RH ou de dirigeant chargé de veiller à la performance et au bien-être de son équipe?
Nous sommes le réceptacle de toute la souffrance ressentie par chaque collaborateur à son niveau. Nous sommes aussi les spectateurs attentifs des rumeurs sans fondement et bruits de couloir qui alimentent les conversations quotidiennes. Nous sommes enfin la cible de celles et ceux qui restent convaincus que gérer l’humain, c’est essentiellement une question de manipulation des travailleurs au profit du grand capital… Et puis quoi encore?
Pourtant, malgré ces quelques inconvénients ‘mineurs’, il n’y a rien de bien compliqué dès qu’il s’agit de People Management. La gestion RH, ce n’est ni une discipline obscure, ni un terrain de jeu où règne l’improvisation. Il s’agit aujourd’hui de comprendre les mécanismes qui déterminent les attentes et les réactions de chaque individu et de définir puis d’appliquer les règles que le collectif souhaite mettre en œuvre. Bon sens, cohérence et disponibilité (avec aussi un peu de créativité lorsqu’il faut sortir d’une impasse) suffisent à assurer l’essentiel. Ce qui veut dire que la discipline est accessible à n’importe qui?
Le sens aigu du partage, et rien d’autre !
Pour qu’une organisation évolue de façon harmonieuse, il est absolument nécessaire de vulgariser les pratiques RH, et dépasser ainsi la crainte – trop souvent présente – de scier la branche sur laquelle on est assis en dévoilant les secrets qui font cette expertise précieuse. C’est l’opacité qui provoque la suspicion d’inutilité voire la méfiance. Pas la transparence. Il n’y a pas de chasse gardée.
L’avenir est dans tous les cas radieux pour les People Managers. Nos entreprises font appel à des experts en la matière parce que ceux-ci décodent l’humain mieux que quiconque. Parce qu’ils ne se trompent jamais (ou rarement…) et parce qu’ils osent aller là où les autres pensent que c’est impossible ou dangereux.
Comment y parvenir? En cultivant la capacité à rentrer en connexion avec chacun.e et en s’engageant personnellement vis-à-vis de celles et ceux qui nous font part de leurs difficultés. Cette double aptitude passe par le développement d’un sens aigu du partage et la conviction profonde que chaque travailleur mérite toute notre attention et tous nos efforts. Souvenons-nous que le contrat de travail repose sur un engagement mutuel des deux parties, chacune affirmant qu’elle mettra tout en œuvre pour que l’autre puisse réussir…
Jean-Paul Erhard