Éditorial – ‘Pour être respecté, il faut être craint’. Comme si la menace et la peur étaient de bons moyens d’affirmer son autorité…

L’actualité politique nous donne quotidiennement matière à réfléchir en matière leadership. Rarement sur les bonnes pratiques, il faut bien le dire. Elle agit plutôt comme une sorte de ‘best of’ de ce qu’il vaut mieux éviter.
Ainsi, la prise de conscience récente des dirigeants européens englués dans le conflit russo-ukrainien se résume en une phrase : « Pour être respecté, il faut être craint »… En clair, les interlocuteurs doivent savoir qu’on ne plaisante pas. Voilà comment pratiquer l’art de la dissuasion. C’est avant tout une excellente nouvelle pour l’industrie de l’armement, et c’est ensuite le niveau zéro en ce qui concerne l’exemplarité et le leadership dont le bon peuple a grand besoin. Comme nous ne faisons pas de politique, la question est : y a-t-il des enseignements à tirer du contexte géopolitique actuel pour nos dirigeants et apprentis managers au sein de nos entreprises et institutions ?

Bomber le torse, c’est un réflexe primal. Lorsqu’on occupe une position de management ou de supervision, une des préoccupations majeures de nos collaborateurs consiste à tester tantôt la confiance tantôt la patience de leurs responsables hiérarchiques. Histoire de voir… Et la réaction la plus basique de ces derniers consiste à affirmer une autorité avec pour objectif premier de protéger la position. Est-ce encore la bonne méthode ?

Postures de défi en cascade

Le gorille, quand il n’est pas content, lui toujours faire comme ça. Le message est clair : ‘’Si tu viens empiéter sur mon territoire, tu dois te préparer à subir les effets de ma terrible vengeance. Un pouvoir terrible va s’abattre sur toi.’’
Spectaculaire, divertissant et… inutile. Parfois risqué aussi si on ne mesure pas avec précision les atouts de l’opposant. Ce que l’on obtient en retour dans la plupart des cas, c’est une posture de défi. L’affrontement est proche. Et il y aura forcément au moins une victime. Pas besoin d’avoir fait de grandes études pour comprendre à quel point ces positions sont improductives.

L’affirmation de la force, souvent connectée à un rôle investi d’une certaine autorité, est perçue comme un message d’insécurité. Personne n’a raison : ni celle ou celui qui veut rappeler son ultime pouvoir, ni l’autre ou les autres qui prend un vil plaisir à tester les limites de celui-ci. Passons à une autre option.

Pas de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre

Le principal écueil que rencontre n’importe quel manager aujourd’hui consiste à diriger des équipes autonomes. Parfaitement contradictoire. Il faut être solide pour endosser sereinement un rôle qui porte une double responsabilité : à savoir celle qui consiste à la fois à promouvoir l’épanouissement voire la liberté de ses collaborateurs et à assumer, en même temps, les échecs potentiels du collectif qui s’émancipe de toute influence.
C’est le propre du leadership participatif : donner les clés du camion à l’équipe après lui avoir expliqué quelle est la destination et accepter que le trajet qu’elle va emprunter ne sera pas celui qu’on a prévu. Idéalement, sa force réside dans sa discrétion. Cela requiert des trésors de pédagogie ainsi qu’une disponibilité constante qui permet d’intervenir à temps lorsque nécessaire. Encore faut-il être entendu et nous n’insisterons jamais assez sur les qualités de communication (non, ce n’est pas ‘juste’ du charisme!) et d’écoute qu’il urge de développer au sein de nos équipes…

Doubles leviers de la raison et de l’émotion

La peur n’est pas un moteur. Nombre de stratèges en change management se sont cassés les dents à force de vouloir créer un sens de l’urgence qui ne génère que de l’immobilisme dans la plupart des cas. Et il faut aussi se méfier de notre propre enthousiasme parfois. L’euphorie peut nous rendre stupide et perdre le sens élémentaire de la mesure.

Bref, pour continuer à vivre ensemble, en bonne intelligence, nous devons faire appel à la raison ET à l’émotion. Nos interlocuteurs doivent à la fois aimer et comprendre.

Ce n’est désormais plus une question de ‘force’, c’est-à-dire la menace qu’elle représente si celle-ci vous prend pour cible ou, à l’inverse, la puissance qu’elle incarne et qui vous emmène loin si vous êtes son allié. En cela, le niveau d’exigence qui s’impose au leadership est plus élevé qu’il ne l’a jamais été.

Pour être respecté, il ‘suffit’ dès lors d’être meilleur que les autres. Afficher chaque jour davantage de maîtrise en matière de justice, de nuance, d’audace, d’anticipation, de tempérance,… et de bien d’autres aptitudes encore qui permettent de compenser la fragilité réelle de nos entreprises, de nos équipes et de nos collaborateurs. Cela prend une carrière entière pour espérer y arriver. Une quête infinie.

Jean-Paul Erhard

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