Un cinquième de l’effort budgétaire décrété par le gouvernement dépend de la réintégration au travail de 100.000 malades de longue durée. C’est un joli pari. Premier feedback syndical indigné : le ministre socialiste pense que les travailleurs absents de longue durée ne sont pas malades.
Et si c’était (au moins partiellement) vrai? Et si une proportion significative des collègues ‘invités’ à retrouver le chemin qui mène durablement au boulot était simplement déçus de l’expérience vécue au sein de leurs entreprises respectives?
Les travailleurs qui ne s’y retrouvent pas au quotidien ont plusieurs options : la démission (courageuse), le désengagement (fréquent), l’absence (néfaste à court, moyen et long terme) … Au-delà de la responsabilisation du corps médical, des mutuelles et des managers parfois toxiques, le moment est venu de réfléchir à la qualité de l’Expérience Collaborateur à laquelle les travailleurs absents ont été confrontés et, surtout, aux moyens de l’amener au niveau supérieur.
Des principes simples, lisibles et enthousiasmants pour tout le monde !
L’idéal du point de vue d’un dirigeant? Créer un esprit entrepreneurial dans tous les départements de son organisation tout en veillant à en conserver la maîtrise. L’objectif porte en soi ses propres contradictions. La traduction auprès des collaborateurs consiste à être en quête permanente d’équilibre entre l’autonomie et l’interdépendance ainsi qu’entre l’effort et la régénération.
L’Expérience Collaborateur (EX) telle que nous pouvons la concevoir aujourd’hui ne nous contraint pas à choisir son camp. L’intérêt de toute entreprise consiste à casser les barrières qui peuvent voir le jour entre celles et ceux qui tirent l’organisation en risquant de se tuer à la tâche et les autres qui les regardent filer tout droit vers la gloire ou l’épuisement.
Au moment de choisir un fil rouge pour définir l’EX, il s’agit de privilégier la cohésion de l’ensemble et d’essayer, humblement, d’engager les troupes dans un mouvement collectif qui alterne les temps forts et les temps faibles abordés avec lucidité. De proposer à chaque membre de notre effectif des principes qui permettent de réussir puis de grandir et qui facilitent la kiffance collective. Une atmosphère énergisante.
La question des conditions et outils de travail encore pertinente ?
Ceci étant, ce n’est pas uniquement une question de culture et d’état d’esprit. La cohérence de l’Expérience Collaborateur, si chère à notre cœur, passe souvent par les conditions de travail et les moyens donnés à chacun.e de remplir ses missions. Est-ce encore le cas aujourd’hui ?
De moins en moins, il faut le reconnaître. Sous l’effet de la dématérialisation, les critères d’efficience et de bien-être dépendent désormais davantage de l’attention que nous portons à la santé mentale, à la dynamique des interactions et à l’équilibre privé/professionnel.
Ce sont les moments de connexion entre le/la collègue avec ses pairs et avec l’organisation qui vont inscrire l’Expérience Collaborateur dans la durée… ou pas.
Pouvoir se libérer des schémas historiques inadaptés
Les processus – et les procédures qui les soutiennent dans la gestion quotidienne – aident à organiser nos entreprises. Ils structurent la coopération nécessaire. Et limitent les possibilités d’offrir des réponses particulières à des besoins particuliers tels qu’ils sont exprimés par certain.e.s collègues…
Un des principes essentiels que nous voulons proposer pour redéfinir l’Expérience Collaborateur consiste à affirmer que nous sommes capables d’imaginer des carrières non linéaires, de planifier des horaires irréguliers, de composer des équipes hybrides, d’offrir des packages de rémunération personnalisés (et équitables)… Les travailleurs – et donc celles et ceux qui en sont éloignés depuis un certain temps déjà – ont besoin de savoir que nous pouvons placer leurs intérêts au premier rang des priorités à chaque fois que cela s’avère nécessaire. L’important au fond, c’est d’entretenir un cadre à l’intérieur duquel les options sont innombrables… et bénéficiaires.
Ce n’est pas un argument marketing comme certains pourraient le craindre puisque nous parlons d’Expérience. C’est un ensemble de lieux et de moments où nous vivons toutes et tous avec le sentiment que tout est possible, sans devoir pour autant créer le chaos.
Des carrières alternatives, des rythmes adaptés, des packages salariaux innovants… C’est sans doute l’Expérience Collaborateur qu’espèrent les 100.000 travailleurs que nous devrions retrouver. Ils reviendront avec plaisir à partir du moment où ils comprennent que tout est possible. Tout, sauf l’indifférence à laquelle ils ont été soumis trop longtemps.
Jean-Paul Erhard

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