Quels sont les progrès réalisés par la Belgique sur le chemin d’un développement durable? Le bilan de 51 indicateurs de suivi des Objectifs de développement durable (les Sustainable development goals de l’ONU, ou SDG) montre qu’en prolongeant les tendances actuelles, peu de SDG seront atteints en 2030. De nouvelles politiques seront donc nécessaires pour atteindre l’ensemble de ces objectifs. Cette conclusion est identique à celles tirées dans les dix évaluations réalisées depuis 2005.
Cet article présente les progrès réalisés par la Belgique vers les objectifs de développement durable, sur la base de 51 indicateurs. Ces indicateurs sont présentés sur le site www.indicators.be du BFP, qui contient au total 86 indicateurs de développement durable. Ils font partie de la liste de suivi des SDG définie par l’Institut interfédéral de statistique pour la Belgique.
Dans cette évaluation, la question posée est de savoir si ces 51 indicateurs atteindront en 2030 un niveau correspondant aux SDG. Pour 25 indicateurs, les SDG et d’autres textes officiels – comme le Programme national de réforme (Gouvernement belge, 2020), la Vision fédérale à long terme de développement durable (MB, 2013) et des engagements internationaux auxquels la Belgique a souscrit – permettent une évaluation précise basée sur un objectif chiffré à atteindre en 2030. Pour les 26 autres indicateurs, seule la direction d’évolution souhaitable peut être déterminée sur base de ces sources. Il n’est alors pas possible de se prononcer sur le niveau actuel de l’indicateur ni sur la vitesse à laquelle il évolue. Deux méthodes différentes sont donc proposées pour évaluer les indicateurs, correspondant à l’existence ou à l’absence de cible pour chaque indicateur.
À tendance inchangée, les SDG ne seront pas atteints en 2030
Pour les deux groupes d’indicateurs (avec une cible ou pas), les constats suivants peuvent être faits. Pour les 25 indicateurs pourvus d’une cible, l’évaluation consiste à comparer le niveau qui serait atteint en 2030 en prolongeant la tendance actuelle avec la cible. Un indicateur sur cinq atteint sa cible en 2030.
Évolution favorable : la cible est atteinte ou pratiquement atteinte en 2030 ; c’est le cas pour 5 indicateurs. Quatre indicateurs atteignent leur cible en 2030 : Fumeurs quotidiens, Recherche et développement, Exposition aux particules fines et Surface marine en zone Natura 2000. Un indicateur atteint pratiquement (écart de moins de 10%) sa cible : Pollution aux hydrocarbures.
Évolution défavorable : la cible n’est pas atteinte en 2030 et le niveau atteint en prolongeant la tendance s’en écarte de plus de 10 %. C’est le cas de 19 indicateurs. Parmi ceux-ci, 13 évoluent néanmoins dans la direction souhaitée, mais leur rythme d’évolution à la hausse ou à la baisse est insuffisant pour atteindre la cible dans les délais. Il s’agit entre autres des Décès prématurés dus aux maladies chroniques et de la Productivité de l’énergie. Six autres n’évoluent pas dans cette direction, entre autres la Maîtrise insuffisante de la lecture et le Transport de personnes en voiture.
L’évaluation est impossible étant donné que l’indicateur fluctue très fortement. C’est le cas d’un indicateur, à savoir les Victimes de catastrophes naturelles. Pour les 26 indicateurs restants, il n’existe pas de cible et seule la direction dans laquelle l’indicateur évolue peut être évaluée.
Parmi ces indicateurs sans cible, presque un tiers évoluent dans la direction souhaitée et plus de la moitié ont une évolution indéterminée.
Évolution favorable : 8 indicateurs évoluent en direction de leur objectif. Il s’agit notamment des indicateurs Consommation de viande, Consommation d’eau et Inégalités de revenu : indice de Gini.
Évolution défavorable : 4 indicateurs évoluent en direction opposée à celle de leur objectif. C’est le cas, entre autres, de la Population d’oiseaux des champs et de l’Inactivité professionnelle en raison de responsabilités familiales.
Évolution indéterminée : pour 14 indicateurs, la direction de l’évolution de l’indicateur n’est pas statistiquement significative. C’est le cas, entre autres, de l’Espérance de vie en bonne santé, de l’Intensité du risque de pauvreté et des Déchets dangereux.
Évaluation favorable pour les indicateurs des SDG 2 et 6, défavorable pour ceux des SDG 4, 5, 7 et 17
L’évaluation par SDG permet d’identifier certains résultats significatifs, même si les trois indicateurs par SDG n’en couvrent pas toutes les facettes.
Les meilleurs résultats sont obtenus pour le SDG 2 (Faim « zéro ») et le SDG 6 (Eau propre et assainissement). Dans ces cas, deux évaluations sont favorables et la troisième n’est pas défavorable. Toutefois, les indicateurs de ces deux SDG sont dépourvus de cible, ce qui relativise la portée de cette évaluation.
La situation est préoccupante pour le SDG 4 (Éducation de qualité), le SDG 5 (Égalité entre les sexes), le SDG 7 (Énergie propre et d’un coût abordable) et le SDG 17 (Partenariat pour la réalisation des objectifs). Pour ces SDG, les trois indicateurs ont une évaluation défavorable. En outre, tous leurs indicateurs (sauf un pour le SDG 5 et un pour le SDG 17) sont pourvus de cibles. Ces évaluations sont dont plus pertinentes que les évaluations faites pour les SDG 2 et 6 ci-dessus.
Pour les autres SDG, il n’y a pas de tendance claire qui se dégagent car les indicateurs ont des évaluations qui pointent dans différentes directions.
Persistance de ces évaluations pessimistes depuis 2005
Il y a en général peu d’évolution entre les bilans successifs. Par rapport à l’évaluation faite en 2019 sur les mêmes 51 indicateurs, 42 d’entre eux gardent la même évaluation. Pour les neuf indicateurs dont l’évaluation change, le changement est 4 fois dans un sens favorable et 5 fois dans un sens défavorable. Ces changements sont dus à un changement de méthodologie (3 indicateurs avec une nouvelle cible : indicateurs 11, 12 et 23 dans le tableau 4 ; un indicateur avec une nouvelle méthode de projection : indicateur 2) ou à l’évolution des indicateurs eux-mêmes, qui se rapprochent ou s’éloignent de leur objectif (5 indicateurs).
Il n’est pas étonnant que ces résultats soient stables dans le temps, dès lors que l’évolution est évaluée à long terme. Ce Bilan tient compte de toutes les données de 2000 jusqu’à l’année la plus récente (de 2018 à 2020 selon l’indicateur) et évalue les tendances dans la perspective de 2030. Une ou deux observations supplémentaires ne débouchent donc que rarement sur un résultat d’évaluation différent.
Ce qui est plus remarquable, c’est que les conclusions des dix bilans d’indicateurs publiés par la Task Force développement durable (TFDD) depuis 2005 restent semblables : la prolongation des tendances actuelles ne permet pas d’atteindre les objectifs d’un développement durable. Même si les indicateurs, les méthodes et les objectifs ont évolués au cours du temps, cette persistance des conclusions interpelle sur le besoin de nouvelles politiques pour prendre en compte les objectifs de développement durable.
Source: Bureau Fédéral du Plan