Un élément supplémentaire à considérer dans le débat autour de la robotisation du travail et de son impact sur le volume de l’emploi au sein de nos entreprises. Les économises du cabinet Deloitte ont mené une étude concernant la relation entre l’emploi et le progrès technologique au cours des 140 dernières années en Angleterre et au Pays de Galles. Publiée par le quotidien The Guardian à la fin de ce mois d’août, celle-ci démontre au final l’impact positif de l’innovation sur le travail humain…
L’analyse nous rappelle dans un premier temps que le débat qui passionne les experts aujourd’hui existe cependant depuis plusieurs siècles déjà. Remontant jusqu’à 1871, l’étude publiée par The Guardian nous démontre que, malgré les inquiétudes actuelles, l’automatisation des tâches via l’introduction de nouvelles technologies a globalement créé davantage d’emplois qu’elle n’en a détruits.
Les conclusions du cabinet Deloitte – dont l’étude entre en lice pour l’obtention du prix Rybczynski de la Society of Business Economists – rappelle que nous nous focalisons souvent sur l’impact négatif du progrès technologique sur le travail et assez peu sur la dimension de création de nouvelles activités qui l’accompagne. Elles démontrent ainsi que la contraction de l’emploi dans les secteurs primaire (agriculture) et secondaire (industrie) ont été plus que largement compensés par la croissance exponentielle du nombre de jobs dans les secteurs des soins (Care), de la création, de la technologie et des services.
Quelques enseignements-clés à la lecture de l’étude :
1. Les emplois dangereux et routiniers tendent à disparaître – La technologie se substitue principalement aux ‘muscles’ humains, avec un impact sérieux sur l’emploi dans ce cas. Est-il cependant souhaitable de maintenir ces tâches dites ‘agressives’ envers la santé des individus qui les remplissent. L’agriculture est le premier secteur concerné par cette réalité (sur le territoire britannique, 6,6% du volume total de l’emploi était constitué de travailleurs du secteur primaire en 1871, contre 0,2% actuellement!).
2. La percée des secteurs des soins, de l’éducation et du service envers les tiers – Un chiffre éloquent : l’augmentation de 909% du nombre d’auxiliaires de santé et d’assistants au cours de ces 20 dernières années (de 1992 à 2014). Au cours de cette même période, les jobs dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement ont connu une progression de 580%… Dans le même temps, certains jobs ont été réduits de manière drastique: les tisserands, couturiers, dactylos et sécrétaires par exemple, autant de fonctions dont le nombre a été diminué de plus de 50%.
3. La technologie soutient le développement de l’emploi dans l’industrie de la connaissance – Citons le secteur médical, l’éducation et les services aux entreprises… Les observations confirment que la productivité et l’emploi se sont développé de concert. Par exemple, le nombre de comptables est passé de 9.832 à 215.678 sur la période consultée (soit de 1871 à nos jours). L’accès à l’information et l’accélération des moyens de communication ont clairement suscité cette évolution.
4. Le progrès technologique a soutenu la consommation de biens de plus en plus luxueux – Les biens de consommation de base ont vu leur prix diminuer (nourriture essentiellement ainsi que les équipements électro-ménagers…). L’argent épargné sur ces produits est réinvesti dans le secteur des loisirs et y soutient la création de nouveaux emplois. L’étude démontre par exemple que l’emploi dans le secteur horeca a été multiplié par 4 entre 1095& et 2011.
Cette analyse rétrospective est-elle de nature à rassurer celles et ceux qui prédisent la disparition massive de l’emploi humain au cours de ces prochaines années? Sans doute non… Elle demeure cependant encourageante quant à notre capacité de transformation et d’adaptation et nous invite à imaginer quels seront les nouveaux besoins à rencontrer et activités à développer en vue de créer de nouveaux emplois demain.