Vendredi dernier, huit organisations de la société civile, dont les trois syndicats et le Réseau belge de lutte contre la pauvreté, ont saisi la Cour constitutionnelle pour contester les conditions d’accès plus strictes à la pension minimum, qui touchent principalement les femmes. Elles ont introduit une demande d’annulation visant spécifiquement la condition supplémentaire de 20 ans de ‘travail effectif’.
C’était l’une des plus grandes avancées du gouvernement fédéral sortant : la hausse significative de la pension minimum, qui a augmenté de 15 % au cours des quatre dernières années, en plus de l’indexation. Le revers de la médaille ?
À partir du 1er janvier 2025, les conditions d’accès à cette pension minimum revalorisée seront durcies. En plus des critères existants, une nouvelle condition s’ajoute : avoir au moins 20 ans de ‘travail effectif’. Les périodes traditionnellement assimilées, comme le crédit-temps pour s’occuper des enfants ou l’incapacité de travail, ne seront plus comptabilisées comme du travail effectif.
Ce changement touchera principalement les femmes. À terme, on estime que 3,9% des femmes et 2% des hommes perdront l’accès à la pension minimum. L’impact de cette réforme se fera véritablement sentir pour les personnes nées en 1970 et après. Pour les personnes plus âgées, d’importantes mesures transitoires sont prévues.
Selon le recours juridique, cette nouvelle condition viole les principes constitutionnels d’égalité de traitement et de standstill social. Le législateur n’a pas suffisamment justifié certains choix sur le plan juridique. Par exemple, pourquoi le service militaire, le crédit-temps pour s’occuper des enfants et l’incapacité de travail ne comptent-ils pas comme du travail effectif ? De plus, les organisations estiment qu’il est injuste que les nouvelles règles s’appliquent rétroactivement à des périodes antérieures à l’entrée en vigueur de la loi.
Les organisations de la société civile mettent en garde contre un dangereux précédent politique. Dans certaines notes, comme celle concernant une possible coalition Arizona dirigée par le formateur Bart De Wever, il est même question d’exiger 35 ans de ‘travail effectif’. Cela représenterait un coup de massue pour les pensions de nombreuses femmes. Jusqu’à 60% des travailleurs qui perçoivent normalement une pension minimum – en grande majorité des femmes – pourraient perdre ce droit.
La question se pose alors : quelle est la valeur d’une pension minimum adéquate si seules un nombre limité de personnes peuvent y prétendre ? Selon l’OCDE, la Belgique impose déjà, après la Slovaquie, les conditions d’accès les plus strictes à la pension minimum. Les huit organisations continuent de défendre le principe selon lequel toutes les périodes assimilées, pour des raisons de soins ou d’inactivité involontaire, doivent être prises en compte.
La Cour constitutionnelle devrait rendre sa décision sur cette affaire d’ici environ un an.
Cette initiative est soutenue par une large coalition d’organisations, dont les syndicats FGTB, CSC et CGSLB, les organisations de lutte contre la pauvreté Réseau belge de Lutte contre la Pauvreté et Brussels Platform Armoede, les organisations féminines ZIJkant et Soralia, ainsi que l’organisation de défense des seniors LIAGES.
Source: FGTB