Rapport du Conseil Central de l’Economie: notre modèle économique et social n’est plus adapté pour assurer la compétitivité des entreprises.

A l’occasion de l’édition du Rapport Emploi et Compétitivité du Conseil Central de l’Economie (CCE), la RTBF s’est tournée vers les partenaires sociaux, siégeant au sein du CEE afin de commenter l’état de santé général du modèle économique et social belge. Inflation, compétitivité, réformes… Les défis à venir sont immenses.

La rédaction de la RTBF annonce: « Le pouvoir d’achat et la compétitivité ont globalement été mieux protégés que dans d’autres pays ces dernières années. Toutefois, cela a coûté cher à l’Etat. Au sein du Conseil central de l’économie, le constat est dressé: il faut repenser le modèle si l’on veut pouvoir faire face à de futures crises. »

« Le Conseil central de l’économie épingle aussi le handicap salarial des entreprises belges par rapport à celles des trois pays voisins. Ce handicap sera de 1,7% en 2024. En vertu du système actuel d’encadrement de l’augmentation des coûts salariaux, ce handicap de 1,7% laissera peu, voire pas de marge pour une norme salariale en 2025-2026. »

Impossible de faire face aux prochaines crises

L’objectif de ce rapport était de voir comment des mécanismes tels que l’indexation, la loi de 1996 sur la compétitivité, par exemple, ont fonctionné lors de la crise que le pays vient de traverser. Comment les ménages ont-ils été protégés ? Comment la compétitivité des entreprises a-t-elle été assurée ?

« Globalement, les ménages ont été protégés grâce aux mécanismes d’indexation », résume Luc Denayer, le secrétaire général du Conseil central de l’économie. « Mais les ménages les plus riches ont été surprotégés et le mécanisme d’indexation ne protégeait pas correctement les plus bas revenus », précise-t-il. Le gouvernement a donc dû intervenir via diverses mesures telles que les chèques énergie et cela a eu un coût. Ces mesures ont concerné, de manière indifférenciée, tous les ménages. « Cela a permis de ralentir l’augmentation des prix et donc la transmission aux coûts salariaux ».

Conclusion du rapport du Conseil Central de l’Economie : « il faut repenser l’ensemble du modèle »

Pour y arriver, le chantier est vaste. « Il va falloir travailler sur différents plans : efficacité énergétique des bâtiments, transformation de l’industrie, revoir les mécanismes d’indexation et la loi de 1996 pour avoir des espaces de négociation », explique Luc Denayer. « Ne changer que le mécanisme d’indexation ne permettra pas d’atteindre simultanément l’objectif de protection des ménages, de compétitivité des entreprises et la contrainte budgétaire », poursuit le secrétaire général du Conseil central de l’économie.

La vision des syndicats sur les réformes du système à mener

« On a devant nous un triple défi », résume Thierry Bodson, le président de la FGTB. Pour lui, il faut d’une part, « aller vers une économie bas carbone. Plus on tardera à le faire, plus ça coûtera en termes d’investissements ». D’autre part, il faut, explique le président de la FGTB, « adapter notre économie et surtout notre industrie qui est beaucoup plus énergivore que les voisins » et « améliorer la mobilité au niveau des travailleurs ». Enfin, pour Thierry Bodson, il faut « une meilleure répartition des richesses et, au travers de cela, une révision de la loi de 1996 [ndlr, loi sur la compétitivité] »

On perçoit bien déjà les pierres d’achoppement sur le chemin de ces futures discussions. La loi de 1996 sur la compétitivité des entreprises, par exemple. « Automatiquement, les patrons disent : on va revoir l’indexation automatique des salaires », explique Thierry Bodson. « Ce qu’on demande, c’est de revenir a minima à ce que la loi de 96 était avant le gouvernement de Charles Michel », explique le responsable de la FGTB.

Alors, quand le rapport du Conseil central de l’économie épingle un handicap salarial de 1,7% par rapport aux pays voisins en 2024, là aussi, du côté syndical, on a un autre point de vue. « Les subsides salariaux ont été retirés de la formule et représentent 1,1% ou 1,2%. Cela représente toujours un handicap de 0,5%, mais ce n’est pas juste de ne pas tenir compte des subsides salariaux lorsqu’on compare aux trois autres pays [ndlr, France, Allemagne, Pays-Bas] qui n’en ont presque pas », poursuit le président de la FGTB.

Le risque que ce handicap salarial de 1,7% empêche de négocier une marge salariale pour l’accord interprofessionnel 2025-2026 est grand. « Cela va encore être plus compliqué qu’il y a un an d’expliquer aux travailleurs qu’avec des marges brutes de 40%, il n’y a pas de marge pour les salaires », avertit Thierry Bodson qui, comme les syndicats l’ont déjà plusieurs fois expliqué dans le passé, rappelle qu’il y a des secteurs, « chimie, pétrochimie, industrie manufacturière » qui encaissent des bénéfices mais où la loi de 1996 empêche de négocier des augmentations de salaire collectivement.

A la CSC, Marie-Hélène Ska relativise un peu cette menace de handicap salarial d’1,7%. « Cela ne nous inquiète vraiment pas, car les autres pays avec lesquels nous nous comparons sont en train de négocier des hausses de salaires qui sont significatives », explique la secrétaire générale de la CSC.

Pour la CSC, cela ne veut pas pour autant dire qu’il ne faut pas modifier la loi de 1996. « Si la loi reste ce qu’elle est […], on va se retrouver mécaniquement avec une marge zéro dans les années à venir », avertit Marie-Hélène Ska.

La responsable de la CSC estime elle aussi qu’il faut « revoir les paramètres de fond du modèle économique toujours basé sur les données de l’industrie ». Or, explique la responsable de la CSC, « l’industrie n’est pas le seul secteur qui donne le La ». Il y a aussi le secteur public, les services aux particuliers et aux entreprises, « et leur base économique est importante« , explique Marie-Hélène Ska.

Le point de vue du patronat : attention à la compétitivité des entreprises

Quand on aborde l’idée de remettre le système à plat, du côté patronal, ce sont les points en rapport avec l’évolution des coûts salariaux qui viennent en premier.

Contactée, la FEB, Fédération des Entreprises de Belgique, épingle ce chiffre de 1,7% de handicap salarial en 2024. « Une détérioration qui n’est pas une surprise vue l’indexation », explique Edward Roosens, chef économiste de la FEB. « Cela reste significatif est lors des négociations salariales pour l’accord inteprofessionnel 2025-2026, il n’y aura sans doute pas de marge pour des augmentations réelles des salaires », réagit Edward Roosens.

Alors, lorsque se l’idée de revoir la loi de 1996 sur la compétitivité est émise, la FEB rappelle qu’il faut aussi s’interroger sur l’indexation automatique. « Cette loi de 96 sur la norme salariale, c’est une contrepartie à l’existence d’un système d’indexation automatique », explique Edward Roosens. « Si on veut changer la loi de 96, il faut changer quelque chose à l’indexation automatique ».

Parmi les solutions proposées par la FEB, un système « comme dans les pays voisins » où les hausses salariales sont négociées et pas automatisées, par exemple. Autre piste proposée, une indexation partielle, « on donne automatiquement la moitié en indexation quand il y a une hausse des prix et le reste est négociable », suggère le chef-économiste de la FEB.

La FEB met aussi en avant les changements qu’impliqueront la révolution verte et la révolution digitale sur le marché de l’emploi. Il faut « voir comment faire en sorte que tout le monde ait les compétences nécessaires pour gérer cette transition », explique Edward Roosens. « Beaucoup de gens vont devoir changer de métier », avertit-il. La formation des travailleurs, c’est aussi un point qui peut faire l’objet de discussions et de négociations entre partenaires sociaux.

 

Source: RTBF

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