Editorial – Déconnecter pendant les vacances… Tu veux ou tu veux pas ?

« Out of office pour les trois prochaines semaines afin de profiter d’un repos bien mérité – en cas d’urgence, envoyez moi un WhatsApp et je vous reviens aussi rapidement que possible ». Voilà ce que nous allons lire plusieurs fois par jour au cours des 9 prochaines semaines. Ce sont les vacances. Une bonne partie des travailleurs vont laisser le boulot totalement de côté. Et dans le même temps, nombreux sont ceux qui vous préviennent qu’ils sont absents mais avancent avec force qu’ils/elles restent joignables. Ce sont les mêmes qui reviennent en fin de vacances en constatant qu’ils n’ont pas bénéficié d’un vrai repos… La faute à qui? A l’employeur ou aux clients qui ne respectent pas ce temps de pause ou au collaborateur lui-même qui angoisse à l’idée de perdre le fil de son actualité professionnelle? C’est quoi, la bonne approche pour profiter de nos vacances sans crainte de perturber la continuité du business?

Notre temps de travail observe un rythme de plus en plus saccadé. Ce sont des périodes de rush intense qui se succèdent, pendant lesquelles il s’agit de tenir bon, grâce à la perspective d’une plage de repos qui s’annonce pour un moment en famille ou un départ sous d’autres horizons. Ainsi, au cours d’une année, il est fréquent désormais de planifier trois ou quatre ‘longues’ pauses pendant lesquelles il est conseillé de se déconnecter vraiment. Mais nous ne sommes pas nombreux à y arriver… En cause, un rapport contrarié à l’équilibre privé/professionnel et cette foutue propension à croire bêtement que nous pourrions être indispensables à la bonne marche des affaires.

Grosse confusion dans la gestion de l’espace/temps

Plusieurs phénomènes récents démontrent que la gestion des sphères privée et professionnelle est nettement plus complexe qu’auparavant. Certain.e.s surfent avec bonheur sur la possibilité de travailler à peu près n’importe où et n’importe quand. D’autres cherchent leur voie dans un éventail de possibilités encore inédit.
La confusion des lieux est massive, depuis longtemps déjà. Le bureau s’est installé dans les domiciles. Mais les dispositifs privés ont à leur tour pénétré les murs de l’entreprise. A cela s’est ajoutée la confusion des temps qui est la vraie révolution post-covid. Les horaires de travail sont en train d’exploser, sauf bien sûr pour les jobs les moins flexibles. En dehors de ces cas confrontés à une présence de première ligne ou à des impératifs de production bien cadrés, nous travaillons à peu près n’importe quand, en cherchant doucement les moments les mieux adaptés à nos besoins personnels. Ce n’est pas étonnant que les périodes de vacances souffrent de cette confusion grandissante. Lorsque nous parlons de ‘workation’ par exemple, nous pouvons interpréter cela comme une preuve supplémentaire de l’hybridation en cours du marché du travail mais aussi comme l’annonce de sérieuses difficultés à déterminer si nous sommes en vacances, ou pas…
L’alternative est posée: soit nous replaçons de nouvelles balises entre le privé et le professionnel, soit nous développons de nouvelles compétences qui nous aideront à mieux vivre dans l’entre-deux permanent.

Des rythmes individuels versus une dynamique collective

Par ailleurs, nos besoins en matière d’éloignement du boulot et de repos sont plutôt ‘intimes’. Pour certains, un weekend court suffit pour recharger les batteries et repartir semaine après semaine sans puiser dans leurs ressources. Pour d’autres, une rupture de trois à quatre semaines est indispensable afin de pouvoir tenir le coup. D’autres encore obéissent aux rythmes scolaires qui permettent désormais de ralentir pendant quelques belles journées à l’occasion des vacances de nos enfants, çàd toutes les 7 semaines en gros. Chacun cherche son rythme. Les plus chanceux (ou astucieux) le trouvent.
Aujourd’hui, la priorité est clairement fixée sur les impératifs individuels. Et c’est l’efficacité collective qui en souffre. Dans un environnement qui privilégie les réponses individualisées, cela semble inévitable et génère de solides frustrations.
Il y a une manière simple de ‘régler le problème’… Des organisations s’arrêtent pendant plusieurs semaines, tout simplement. Au fond, cela s’avère beaucoup plus simple. En fermant les portes de l’entreprise pour une période bien déterminée, les sollicitations vont naturellement s’arrêter pendant ces quelques jours ou semaines soigneusement sélectionnés dans le calendrier.
Deux obstacles majeurs sur la route de cette solution ‘évidente’? Cela impliquerait que les clients acceptent cette absence prolongée (ils n’ont plus été habitués à cela depuis longtemps déjà!) et cela supposerait également que tous les membres de l’équipe s’arrêtent eux aussi à des dates imposées. L’effort ne semble pas insurmontable mais il vient en contradiction brutale avec tous les dispositifs que nous avons mis en place et qui visent à répondre instantanément aux ‘caprices’ de nos clients chéris ainsi qu’aux besoins perso de nos collaborateurs. Pas de solution idéale clairement… L’art du compromis a encore quelques belles années devant lui.

Personne n’est indispensable, tout le monde est nécessaire…

Enfin, nous pouvons constater que les freins à une déconnexion totale ne sont pas uniquement imputables à des employeurs et clients impatients. Dans bon nombre de cas, ce sont les travailleurs eux-mêmes qui rechignent à couper les ponts, ne fût-ce que pour quelques jours. Le syndrome FOMO (Fear of Mission out, qui traduit l’anxiété sociale de celles et ceux qui craignent de manquer un événement ou une information clé) s’exerce pleinement. Et nous pouvons y ajouter un phénomène d’insécurité ou de protection de nos périmètres de responsabilités respectives. En cas d’absence, ce sont des collègues plus ou moins bien intentionnés qui devront reprendre les rênes de l’équipe ou du département et qui pourraient, en marge d’un incident mineur, mettre en évidence l’une ou l’autre imperfection dans notre travail quotidien. La volonté de rester connecté à chaque instant, y compris lorsque le temps des vacances est venu, ne repose pas que sur une envie de bien faire poussée à son paroxysme. D’autres motivations, moins nobles, peuvent entrer en jeu.

Une des évidences que nous aimons rappeler régulièrement devrait nous aider à relativiser : personne n’est indispensable, tout le monde est nécessaire. Pour la vivre sereinement, mieux vaut être solidement ancré dans une double relation de confiance : vis-à-vis de nous-mêmes et de nos propres capacités pour commencer, vis-à-vis de l’équipe ensuite sur laquelle nous savons pouvoir compter en cas d’absence. Reste donc à se départir de ces préoccupations pour passer en mode vacances avec la même détermination que lorsqu’on commence un nouveau projet excitant.
Pas besoin d’aller chercher très loin au fond. La chanson (« Tu veux ou tu veux pas ») était claire! Elle disait ceci:
« La vie, oui c’est une gymnastique.
Et c’est comme la musique.
Y a du mauvais et du bon
La vie, pour moi elle est magnifique
Pour pas que tu la compliques
Par des hésitations. »

Jean-Paul ERHARD

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