L’Intelligence Artificielle, n’est-ce pas l’outil idéal pour gérer les Ressources humaines dans nos entreprises à l’avenir? C’est le débat auquel nous avons été le plus souvent confrontés au cours de ces dernières semaines. Précision importante : le questionnement ne porte pas sur l’utilisation de l’IA en guise de soutien et d’amélioration de nos plateformes numériques. Il s’agit aujourd’hui d’évaluer la possibilité d’un vrai remplacement. En clair, imaginons que nous mettions face à face une bonne petite équipe RH classique et une plateforme pilotée par l’Intelligence Artificielle, en mode combat dans l’octogone de la MMA… Qui sort vainqueur de cet affrontement?
D’un côté, un groupe de professionnels RH rompus aux défis de l’Expérience Collaborateur, habitués à répondre aux demandes parfois incongrues des collaborateurs. De l’autre, l’IA et sa capacité à traiter dans l’instant des données complexes et à proposer une solution, qu’elle acceptera de retravailler sans discuter tant que le ‘client’ n’est pas satisfait. S’il fallait vraiment poser un choix, au lieu d’organiser une cohabitation heureuse entre les deux ‘parties’, que ferions-nous ?
Bien plus désormais qu’un nouvel assistant personnel !
L’introduction, puis la généralisation du recours à l’Intelligence Artificielle dans la gestion quotidienne des RH correspondait au fond à disposer d’un nouveau format d’assistance personnelle. Celle qui anticipe nos besoins et coordonne sans délai des données qui doivent être connectées. Il s’agit de bien autre chose désormais.
D’une part, moyennant l’alimentation en données de bonne qualité, les outils digitaux sont capables d’apporter une réponse à la quasi-totalité des questions posées par nos collaborateurs, et ce dans tous les domaines qui concernent le People Management.
Et d’autre part, les interfaces gérés par l’IA sont directement accessibles à chaque travailleur. Le contact avec l’utilisateur final est dès lors confié à une plateforme numérique, sans intervention humaine. Avec empathie, qui plus est. Le gain de temps est phénoménal, la disponibilité totale et la qualité du service est constante.
Never complain, never explain
L’avantage majeur de l’IA réside peut-être dans son caractère imperturbable (ce qui peut la rendre irritante également). Un collaborateur mécontent et agressif ? No problemo. Nous avons toutes et tous déjà été confrontés à l’insupportable obstination du chatbot qui repart en boucle lorsque notre demande ne rentre pas dans les cases de sa programmation.
La possible frustration des utilisateurs fait partie des hypothèses. Ni plus, ni moins. Elle s’exprimera ailleurs, dès qu’un contact pourra être établi avec un humain qui aura à composer avec l’insatisfaction accumulée.
L’Intelligence Artificielle ne se plaint jamais. Elle ne cherche pas à justifier ses manquements. Le risque de débordement est nul.
Le scénario du grand remplacement est-il plausible ?
L’intérêt de transférer la majeure partie voire l’intégralité de la gestion RH à l’IA est réel. C’est une option qui vient s’ajouter à celles qui sont déjà disponibles lorsqu’il s’agit de structurer le suivi des effectifs à l’intérieur d’une organisation qui grandit.
Toutefois, ce n’est pas seulement un choix technologique. C’est peut-être avant tout une décision quant au degré d’autonomie que nous voulons offrir à nos collaborateurs. Le recours à l’Intelligence Artificielle va de pair avec l’implémentation de ce que nous appelons l’Employee Self Service. Est-ce la solution adaptée et suffisante pour répondre aux attentes de plus en plus diverses de nos collègues? Nous ne le pensons toujours pas.
Essayons de faire preuve de réalisme et d’ambition en même temps. L’empathie n’est plus un argument suffisant pour différencier l’apport de l’IA et de l’humain en matière de RH. Pas plus que le degré de personnalisation dans le service que nous pouvons offrir aux utilisateurs.
Pour le moment, le parti pris dominant est celui de la complémentarité. Pour combien de temps encore ?
Le futur d’une gestion RH assurée par de bons professionnels faits de chair et de sang passera sans doute par notre capacité à composer des organisations insolites, à réunir des profils différents au sein d’une équipe unique, à imaginer de nouvelles fonctions et de nouveaux rôles pour celles et ceux qui ne rentrent pas dans les cases. A travailler sur le collectif tandis que nos travailleurs augmentés d’une bonne dose d’IA veilleront à prendre soin d’eux-mêmes (quitte à crier à l’aide dès que nécessaire…).
Jean-Paul Erhard