À l’occasion de la Journée internationale de la visibilité des personnes transgenres, le site d’emploi belge StepStone a interrogé près de 121 employé·e·s transgenres* de différents secteurs d’activité en Belgique et dévoile maintenant son enquête “Employé·e·s transgenres au travail en 2021”. Les résultats mettent en lumière les défis professionnels auxquels les employé·e·s transgenres sont confronté·e·s aujourd’hui dans la société belge, grâce aux témoignages d’employé·e·s transgenres sur leurs expériences personnelles sur le lieu de travail et les obstacles qu’ils/elles/iels peuvent rencontrer.
Une question clé de l’édition de 2017 mettait en avant les employé·e·s transgenres ayant quitté leur emploi car l’environnement de travail n’était pas accueillant. À l’époque, 27% d’entre eux/elles/iels avaient confirmé avoir déjà vécu cette situation. En 2021, ce pourcentage a encore augmenté et se situe à 39% des répondant·e·s qui déclarent avoir déjà quitté leur emploi au cours de leur carrière. Un peu moins de la moitié (48%) ont déclaré que ce n’était pas leur cas, tandis que 13% ont choisi de ne pas répondre ou ont indiqué que cette question ne s’appliquait pas à leur situation.
L’âge semble également être un facteur potentiel, puisque 48 % des participant·e·s de moins de 35 ans déclarent avoir déjà quitté leur employeur/euse en raison d’un environnement peu accueillant, contre 34 % des participant·e·s de plus de 35 ans.
Plus précisément, 31 % des répondant·e·s s’identifiant comme femme transgenre ont déclaré avoir déjà quitté leur emploi en raison d’un environnement peu accueillant (48 % ont répondu non et 21 % ont préféré ne pas répondre), tandis que pour les participant·e·s s’identifiant comme homme transgenre, ce chiffre était de 43% (43% ont répondu non et 13% ont préféré ne pas répondre). Pour les répondant·e·s non-binaires, ce chiffre était de 42 % (25 % ont dit non et 33 % ont préféré ne pas répondre).
En outre, plus de 2 répondant·e·s sur 3 (68%) expliquent avoir estimé nécessaire, à un moment donné de leur carrière, de cacher leur identité et/ou expression de genre à leurs collègues.
Près de 2 répondant·e·s sur 3 ont été victimes de discrimination en raison de leur statut d’employé·e transgenre
Malheureusement, les chiffres sur la discrimination (ou a minima la visibilité de celle-ci) semblent avoir augmenté depuis l’étude réalisée par StepStone en 2017. En 2021, 65% des personnes interrogées ont déclaré avoir déjà été victimes de discrimination au travail parce qu’elles étaient transgenres. Ce pourcentage a augmenté de 3 points par rapport à 2017 (65 % aujourd’hui contre 62 % en 2017).
En ce qui concerne la répartition par âge, 73 % des répondant·e·s de moins de 35 ans ont déclaré avoir déjà fait l’objet d’une discrimination parce qu’ils/elles/iels étaient des employé·e·s transgenres. 61 % des participant·e·s de plus de 35 ans ont affirmé la même chose. Si l’on examine les différents sous-groupes, 73% des hommes transgenres et 62% des femmes transgenres ont indiqué avoir déjà subi une discrimination, contre 75% des répondant·e·s non-binaires.
Les principaux champs d’application de la discrimination, selon les personnes interrogées en 2021, sont les suivants :
- La discrimination liée à la protection et au respect de la vie privée (17%)
- La discrimination pendant la phase de recrutement et l’entretien d’embauche (15%)
- La discrimination en cas de licenciement et/ou de démission (15%)
Joz Motmans, coordinateur du Transgender Infopunt et professeur en Études des Genres, ajoute : “En tant que Transgender Infopunt, nous sommes un centre officiel de réception de plaintes pour discrimination fondée sur l’identité et l’expression de genre, et la plupart des cas que nous recevons concernent des problèmes au travail. Nous travaillons en étroite collaboration avec les organismes chargés de l’égalité dans notre pays pour assurer le suivi de ces plaintes.”
« Le soutien gouvernemental actuel est insuffisant », alors que les ressentis sur l’attention accrue des médias et les défis à relever en 2021 sont partagés
Lorsqu’on leur demande si le gouvernement de notre pays fournit un effort suffisant pour soutenir les employé·e·s transgenres au travail, seuls 14% des participant·e·s répondent que le soutien actuel est (plus que) suffisant. Alors que 28 % choisissent de rester neutres, 58 % ont déclaré que le soutien du gouvernement est soit insuffisant, soit totalement insuffisant.
Il est intéressant de noter que 84% des francophones interrogé·e·s ont déclaré que le soutien actuel est (totalement) insuffisant, alors que ce n’est le cas que pour 51% de leurs homologues néerlandophones. Cette tendance plus négative était similaire dans les différents groupes d’âge, bien que légèrement plus élevée pour les participant·e·s de moins de 35 ans dans les deux groupes linguistiques.
Toutes les réponses n’ont pas été aussi tranchées. En effet, les propos suivants semblent avoir divisé les répondant·e·s. En ce qui concerne l’attention des médias, les participant·e·s ont partagé leurs ressentis sur la déclaration suivante : “L’acceptation et la compréhension des employé·e·s transgenres sur le lieu de travail se sont améliorées grâce à l’attention accrue des médias”. Les résultats ont été :
- 44% (complètement) d’accord
- 29% ni d’accord ni en désaccord
- 26% (complètement) en désaccord
La déclaration “Les employé·e·s transgenres sont confrontés à moins de défis en 2021 qu’auparavant” a donné lieu aux réponses suivantes :
- 39% (complètement) d’accord
- 30% ni d’accord ni en désaccord
- 30% (complètement) en désaccord
Les employeurs/euses belges pourraient montrer plus de soutien
Les résultats de l’enquête indiquent également que les employeurs/euses belges ont de grandes possibilités de soutenir les employé·e·s transgenres sur le lieu de travail. Une proportion étonnante de 62,5 % des personnes interrogées a déclaré que leur employeur/euse n’apporte aucun soutien spécifique aux employé·e·s transgenres. Ici, il n’y a pas eu de différence significative entre les répondant·e·s francophones et néerlandophones. Lorsque le soutien est déjà présent sur le lieu de travail, c’est principalement dans ces catégories :
- Des lignes directrices pour éviter la discrimination sur l’expression et l’identité de genre au travail, selon 32% des répondant·e·s
- L’égalité des chances de développement et de promotion pour les employé·e·s transgenres, selon 28% des répondant·e·s
- L’indication explicite dans les offres d’emploi que les employé·e·s transgenres sont les bienvenus, selon 21% des répondant·e·s
Il est intéressant de noter que 42 % des personnes interrogées ont déclaré qu’elles recherchaient activement des entreprises ayant une politique favorable aux personnes transgenres lorsqu’elles postulaient pour un emploi. Seuls 31 % ont déclaré que ce n’était pas le cas, tandis que 27 % ont choisi de ne pas répondre ou ont indiqué que la question ne s’appliquait pas à leur situation.
En outre, 7 % des personnes interrogées ont déclaré qu’elles recevaient explicitement le soutien d’un organisme de soutien aux personnes transgenres pour trouver un emploi en raison de leur identité et/ou de leur expression sexuelle.
Le professeur Motmans ajoute : « Les employeurs/euses devraient prendre conscience de leur contribution potentielle au bien-être des personnes transgenres au travail. Une politique transgenre explicite au travail est utile à la fois pour les entreprises et pour les employé·e·s car elle crée de la transparence, de la visibilité et de l’égalité. Chez Transgender Infopunt, nous sommes là pour aider les entreprises à mettre en place une telle politique, comme nous l’avons déjà fait avec succès pour le gouvernement flamand et pour les chemins de fer belges ».
Aurore Dufrasne, psychologue de Genres Pluriels (association de soutien aux personnes transgenres et intersexuées), chargée de cours en faculté de médecine et coordinatrice du Réseau Psycho-médico-social Trans* et Inter* Belge, souligne le rôle médiateur de l’association dans l’accompagnement des signalements quant aux discriminations vécues par les personnes transgenres au travail. Dans bon nombre de situations, une sensibilisation aux transidentités est proposée à l’employeur/euse et à l’équipe.
La transition, un changement qui pourrait avoir un impact sur les relations entre les employé·e·s transgenres et leurs collègues
Parmi les répondant·e·s, 86% avaient déjà pris des mesures en vue d’une éventuelle transition (sociale, médicale et/ou légale). Ici, StepStone a interrogé les participant·e·s sur le soutien au travail pendant ce processus de changement de vie et son impact sur l’employé·e.
Il semble que le soutien et l’orientation appropriés pendant la transition par le département des ressources humaines soient mieux établis que les lignes directrices et actions plus générales mentionnées ci-dessus. Près d’une personne sur trois a confirmé avoir reçu un soutien approprié du département RH (31%), tandis que 27% ont déclaré ne pas l’avoir reçu et que pour 41%, la question n’était pas applicable.
La réaction des collègues semble également être jugée plus positive. Un pourcentage impressionnant de 60 % des répondants a déclaré que leurs collègues ont réagi de manière soit relativement, soit principalement positive, tandis que pour 8 %, les réactions étaient (très) négatives. 71% ont également déclaré se sentir (totalement) accepté·e·s par leurs collègues, tandis que pour 12%, ce n’était pas (du tout) le cas.
Les employé·e·s transgenres qui ont pris des mesures en vue d’une éventuelle transition déclarent que leur propre performance au travail a également connu un impact positif. Plus de 4 personnes sur 10 (44%) estiment que leurs performances sont (bien) meilleures depuis leur transition. Pour 6%, la performance a diminué.
Les évaluations du niveau de stress sur le lieu de travail depuis la transition sont en revanche partagées. Près d’une personne sur trois (32%) a déclaré que son niveau de stress était (bien) meilleur, mais pour 20 %, il était soit pire, soit bien pire. Pour 29%, le niveau de stress est resté le même qu’avant la transition.
Source & Méthodologie: avec l’enquête “Employé·e·s transgenres au travail en 2021”, StepStone espère soutenir une plus grande conscientisation des problèmes d’emploi rencontrés par les travailleurs/euses transgenres et aider la société dans son ensemble à comprendre les obstacles importants que rencontrent les personnes transgenres. En ce qui concerne la répartition démographique, 121 employé·e·s transgenres belges ont été interrogé.e.s, dont 25% étaient francophones (30), 67% néerlandophones (82) et 8% anglophones (9). En ce qui concerne l’âge, les groupes suivants pourraient être reconnus: 16-24 ans (9%), 25-34 ans (26%), 35-44 ans (29%), 45-54 ans (20%), 55-64 ans (15%) et plus de 65 ans (1%). En ce qui concerne l’identité de genre, 31% s’identifient comme femme transgenre, 26% comme homme transgenre et 15% comme non-binaire (personnes ne s’identifiant ni homme, ni femme, ou les deux à la fois), plus précisément. Ces données ont été recueillies de janvier 2021 à février 2021.