Nous adorons réfléchir et comprendre. Le bouleversement des activités RH, entre autres, suite à l’introduction de l’Intelligence Artificielle est en quelque sorte prévu. En soi, il est donc peu approprié de parler encore d’un bouleversement! Nous y avons consacré un dossier il y a près de 12 mois déjà pour constater, à nouveau que l’enjeu central sera certainement celui de la formation de nos équipes, une fois de plus.
Aujourd’hui, il nous semble pertinent d’aborder une autre question: faut-il accepter le caractère inexorable de l’introduction de l’Intelligence Artificielle dans toutes nos activités? Intuitivement, la réponse sera négative. Mais nous savons que ceci n’est pas suffisant. Reste désormais à argumenter.
Pourquoi voulons-nous à tout prix introduire l’intelligence artificielle là où aujourd’hui, ce sont de gentils êtres humains qui remplissent la fonction?
Au-delà de l’intérêt de mettre en oeuvre notre génié et notre capacité d’innovation, pourquoi vouloir se passer des gens qui réalisent les tâches que nous pensons allouer à l’IA demain ? Qu’entendons-nous parmi les hypothèses valides développées par ces ‘chers’ experts en la matière?
1. L’ IA coûte moins cher que cette foutue main d’oeuvre lourdement taxée par l’Etat.
Honnêtement, cela reste à prouver… Les chefs de projet vous confirmeront que les coûts de développement et de maintenance sont systématiquement sous-estimés. Seul semble compter l’exploit technologique que nous sommes en passe de réaliser. Au moment de mener le décompte final, la balance des coûts est souvent beaucoup plus équilibrée qu’on ne le croit.
2. L’IA sera plus efficace dans la réalisation des tâches et présente une fiabilité nettement supérieure à celle de l’humain.
C’est sans doute vrai. Les tâches menées par les systèmes pilotés par l’IA sont plus rapides, plus régulières, plus documentées.
Ceux-ci garantissent en outre une meilleure intégration de données complexes ainsi qu’une capitalisation exhaustive de la connaissance. Ce n’est pas négligeable.
3. L’IA va prendre en charge des tâches que l’humain ne veut plus réaliser.
Ne nous voilons pas la face. Les tâches répétitives, sans grande valeur ajoutée, sont déjà automatisées et ne nécessitent pas vraiment l’utilisation de l’IA. C’est précisément là que nous voyons le principal danger qui nous guette.
Dans toutes les tâches que nous exécutons, même les plus ‘basiques’, il y a une dimension relationnelle qu’il serait bon de ne pas oublier.
Conduire un véhicule pour assurer le transport d’un passager en sécurité, assurer le premier contact avec un client en quête d’information, opérer un tri dans un flux important de candidatures… Toutes ces tâches que nous confions désormais à des intelligences artificielles viennent au soutien de la relation entre des personnes qui ont besoin les unes des autres. Ce sont aussi des tâches qui sont devenues difficiles à prendre en charge parce que la tension sociale est élevée. L’humain n’a plus forcément envie d’être en contact avec l’humain et c’est pour cette raison qu’il tend à développer chaque jour davantage la puissance de l’IA.
Il faut reconnaître que l’exercice de fonctions relationnelles est devenu compliqué. Il devient difficile de développer la compréhension mutuelle entre des gens qui ne considèrent plus que l’intérêt général et la patience peuvent avoir quelques vertus. Comprendre l’autre et s’enrichir de son système de pensée représente un gros effort personnel et ceci étant dit, il faut noter que les systèmes d’Intelligence Artificielle y arrivent très bien quant à eux…).
Mas nous pensons que lorsque l’humain ne veut plus être en relation avec l’humain, nous sommes en train de déconstruire bien davantage que de l’emploi. En cela, Lle recours à l’Intelligence Artificielle ne remplace pas l’humain; Elle le transforme. Elle tend, si nous n’y prenons garde, à nous éloigner les uns des autres, en rendant l’interaction inutile. Alors que ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est d’être ensemble…
Jean-Paul Erhard