90% des entreprises n’affichent aucun engagement en matière de gestion responsable des restructurations.

Dans le cadre de son activité de notation de la responsabilité sociale couvrant près de 4000 entreprises cotées dans le monde, Vigeo Eiris publie une étude sur « La gestion responsable des restructurations ». La revue publiée en anglais sous le titre « How do corporations report on the management and impact of restructuring? » prend un écho particulier dans une période ‘chargée’ sur le plan social. Que nous apprend-elle?

Vigeo questionne les termes des engagements de nos entreprises et les dispositifs qu’elles mettent en place pour assurer un caractère responsable à leurs opérations de restructuration. La notation porte sur la visibilité et le portage des engagements, leur exhaustivité par rapport aux principes définis par les conventions de l’OIT, notamment la qualité du dialogue avec les représentants du personnel, leur information dans des délais raisonnables, le choix de mesures appropriées pour limiter les impacts négatifs de ces restructurations sur les salariés concernés.

La notation prend en compte les réactions exprimées par les parties prenantes et, en cas de controverses ou de conflits, la capacité des entreprises à rendre compte du dialogue avec les parties et/ou des mesures correctives qu’elles auraient alors adoptées. La revue porte sur la notation de 3847 entreprises, appartenant à 38 secteurs et opérant dans 55 pays. La période couverte va d’octobre 2015 à septembre 2017.

38% des personnes interrogées ont subi une réduction de leur temps de travail. 

Les principaux constats attestent du chemin qu’il reste à parcourir afin d’améliorer dans nos entreprises la gestion responsable d’une possible restructuration.
« La prise en compte des principes de responsabilité sociale lors des opérations de restructuration et dans les décisions de réorganisation, tels qu’ils sont notamment définis par les Conventions de l’OIT, reste un parmi les points les moins visibles dans les codes de conduites publiés par les entreprises et un des sujets les moins documentés parmi les grilles de reporting utilisées pour rendre compte de leurs démarches de développement durable.
Sur près de 4 000 entreprises sous revue à travers le monde, 90% n’affichent aucun engagement formalisé sur ces questions, et 82% ne rapportent aucune information sur les mesures adoptées pour atténuer les effets de leurs processus de réorganisation sur leur personnel. »

Parmi la minorité d’entreprises ayant formalisé des politiques de gestion responsable de leurs restructurations, 67% s’engagent à limiter le nombre de licenciements, mais seules 4% s’engagent à anticiper et planifier les réorganisations, et à faire en sorte que le plus grand nombre possible d’employés retrouve un emploi.

 « 18% des entreprises rapportent adopter des mesures pour minimiser les impacts des restructurations sur le personnel. Parmi elles :
− 41% rapportent allouer des mesures considérées comme ‘basiques’, telles qu’une
compensation financière ou des départs à la retraite anticipés.
− 42% ont alloué des mesures jugées ‘significatives’. Outre une compensation financière ou des départs à la retraite anticipées, elles ont mis en place des systèmes de suivi individuel de leurs salariés, ou ont eu recours à des services de réinsertion (outplacement)
− 16% ont adopté des mesures jugées ‘tangibles’, visant entre autres à retenir un maximum d’employés et à maintenir des emplois, notamment via des programmes de formation, de mobilité interne ou de réduction d’heures travaillées. »

Trop peu de mobilité interne.

Compensations financières et suivis individuels des employés sont les mesures les plus fréquemment mises en oeuvre. A l’inverse, programmes de mobilité interne et services de reclassement (outsourcing) figurent au rang des mesures les moins proposées.

Des disparités d’engagements et de performances sont observées selon les secteurs et zones d’activité. Ainsi, Vigeo relève que les 10 secteurs qui offrent les mesures les plus tangibles à leurs salariés afin de limiter les effets des processus de réorganisations sont situés en Europe. Il s’agit généralement de secteurs fortement touchés par des réorganisations ces dernières années : banques diversifiées, fournisseurs de gaz et électricité, grande distribution, industrie automobile, pharmaceutique et biotechnologie, mines et métallurgie, tourisme, boissons, équipements et composants électriques. Les secteurs au sein desquels les entreprises ont obtenu les scores les plus faibles sont localisés dans les pays émergents et en Asie.

Seules 2.5% des entreprises ont fait l’objet de controverses sur la gestion de leurs processus de restructuration. Nombre d’entre elles sont relatives à des conflits entre employeurs et syndicats, ces derniers critiquant un manque de consultation de salariés ou la mise en place de mesures inadéquates. Ces conflits aboutissent parfois à des grèves ou des actions en justice.
− Les 104 controverses recensées dans notre base de données concernent majoritairement des entreprises européennes (58%) et américaines (26%). Les entreprises des secteurs des mines et de la métallurgie ainsi que les fournisseurs de gaz et d’électricité, très touchées par des pertes d’emplois liées aux transformations numériques et aux processus d’automatisation et de robotisation des tâches, font face au plus grand nombre d’allégations.

En ce qui concerne les réponses apportées par les entreprises:

− 15% des cas observés ont été suivis de mesures volontaires de la part des entreprises visant à mettre fin aux blocages et problèmes soulevés. Seuls 2% des cas de controverses ont fait l’objet de mesures correctrices visant à remédier de façon permanente aux problèmes soulevés (ex: changements structurels, changement de politiques internes) et à prévenir toute résurgence.
− Dans 42% des cas, les entreprises ont communiqué publiquement leur position sur les faits, et parfois sur les mesures mises en place suite à l’intervention d’un tiers, généralement à la suite d’une décision de justice.
− Dans 41% des cas, elles n’ont pas réagi publiquement.

Vigeo conclut encore qu’en ces temps caractérisés par la flexibilité de l’emploi – dans un contexte de ‘gig economy’, les travailleurs ont plus que jamais besoin de visibilité et de prévisibilité.

« En décembre 2017, l’OCDE a publié un document sur les politiques visant à promouvoir un entreprenariat inclusif suggérant aux décideurs politiques de ne pas sous-estimer le rôle joué par les politiques et les programmes d’aide au travail indépendant afin d’aider les salariés à retrouver un emploi après avoir perdu le leur, notamment à la suite d’une restructuration majeure de leur entreprise.
Dans une économie mondialisée, la gestion responsable des restructurations et des réorganisations est une question fondamentale sur laquelle les entreprises doivent s’engager pour offrir à leurs salariés et aux communautés qui les entourent des conditions de travail et des emplois décents. La crise actuelle de l’emploi au niveau mondial représente un risque d’insécurité qui concerne les revenus de millions de travailleurs. »

Les résultats du sondage d’opinion mondial annuel de la Confédération syndicale internationale (CSI), publiés à l’occasion de la 17e réunion du Conseil général de la CSI en décembre 2017, montrent que la perte d’emplois – avec la montée des inégalités – représente l’une des principales préoccupations des travailleurs dans le monde, en particulier chez les femmes et les jeunes. Le sondage indique qu’au cours des deux dernières années, 38% des personnes interrogées ont, elles-mêmes ou un membre de leur famille, été au chômage, ou qu’elles ont subi une réduction de leur temps de travail. Le sondage mondial de la CSI indique également que les entreprises sont perçues comme ayant les pleins pouvoirs en matière d’emploi, et les gouvernements comme ne faisant pas assez pour protéger les travailleurs.

C’est dans ce contexte que les Nations Unis ont adopté l’Agenda 2030 pour le développement durable, dont l’objectif est de lutter contre la pauvreté et la faim dans le monde, de réduire les inégalités, de protéger la planète de la dégradation, d’assurer la prospérité et de promouvoir la paix. Cet Agenda contient 17 objectifs, dont l’objectif n°8 intitulé « Promouvoir une croissance économique soutenue, partagée et durable, le plein emploi productif et un travail décent pour tous ».

 

Source : Vigeo

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