Editorial – « On verra ça l’année prochaine! » Les jeunes diplômés retardent leur entrée sur un marché du travail en pénurie et nous pouvons changer cela.

Nos enfants sont de plus en plus nombreux à repousser l’entrée sur le marché du travail. Elles/ils arrivent en fin de parcours scolaire (peu importe s’il s’agit d’un cursus universitaire ou du cycle de l’enseignement secondaire, général ou professionnel…) et se posent la question: j’y vais ou j’y vais pas? Suis-je prêt.e? La réponse à cette dernière question est évidemment non. Tu n’es pas prêt.e, mon petit chat. Mais ce n’est pas une raison suffisante pour ne pas y aller. Essayons de voir comment nous pourrions rassurer et enthousiasmer le fruit de nos entrailles afin qu’elles/ils puissent entamer leur carrière professionnelle sans attendre.

Confrontés au double rôle de manager et de parent, nous sommes peut-être tiraillés entre l’envie d’émanciper ces individus en quête de liberté et et de responsabilités d’une part, et la crainte de les voir réaliser dans la douleur que leurs belles années (d’insouciance…) sont terminées. Nous avons toutefois les compétences et les réseaux pour les aider à passer le cap sans heurt ni trauma. Que pouvons-nous faire?

Promouvoir l’alternance, avec ou sans la motivation des enseignants.

Entamons notre réflexion partagée en prônant une démarche très volontariste en matière d’apprentissage. Il ne sert pas à grand chose de râler encore et encore sur l’inadéquation des enseignements à la réalité du terrain. Et lorsqu’on évolue dans le monde entrepreneurial, il est sage de réaliser que se rapprocher de l’enseignement est un voeu pieux. Nous connaissons la difficulté de marier des cultures et des profils qui ne partagent rien (ou presque) dans leur quotidien. Les perspectives d’un prof et celles d’un manager sont tellement différentes. De plus, l’envie de bosser ensemble est souvent inexistante. Partant de là, on fait quoi?

Nos entreprises doivent revendiquer leur vocation de lieux d’apprentissage et de formation. Et faire le premier pas sans attendre d’être sollicitées. Enfin, pour que les formules d’alternance soient efficaces, il semble important qu’elles s’inscrivent dans un continuum. En clair, parier sur une mise à l’emploi quasi certaine est certainement le meilleur moyen de voir toutes les parties consacrer leurs meilleurs efforts à la réussite d’un projet de formation en alternance. Ce qui exige un peu de vision long terme et d’engagement sincère, rien que ça.

Investir sans retenue et donner le choix, y compris celui qui consiste à créer sa fonction

Tous les managers conçoivent ensuite aisément que le recrutement d’un jeune diplômé représente avant tout un investissement. Qui s’assimile souvent à un pari. Restera, restera pas? On ne le sait pas.
Toutefois, les leviers d’action qui permettront d’accroître les chances de rétention sont connus. Il ‘suffit’ d’offrir une saine et abondante nourriture intellectuelle, un réseau de relations dense et un flux continu d’opportunités de développement au sein de l’organisation. En respectant ces besoins plutôt bien identifiés et en adaptant les réponses aux préférences de chacun, nous contribuons à l’évidence à l’entrée réussie des nouveaux talents sur le marché du travail.

Ensuite, nous pouvons aller un pas plus loin. L’accueil d’un nouveau talent représente aussi une opportunité de repenser notre organisation et de créer des rôles et fonctions qui n’existent pas encore. Qui mieux qu’un collaborateur vierge de toute influence peut en effet approcher cette mission avec la fraîcheur et la liberté qui conviennent? Donnons lui donc l’occasion de changer la donne dès les premiers jours.

Rendre possible la formation continue en horaire décalé, un bon compromis.

Il reste enfin à tenter de s’inscrire dans la durée. Le soutien que nous pouvons offrir à tous nos talents, jeunes et moins jeunes, en matière de formation continue mérite davantage d’attention de notre part. Les demandes de leur part sont nombreuses d’ailleurs.
En soi, le réflexe consistant à vouloir approfondir sa propre formation est un bon signal. C’est à la fois l’expression d’une forme de questionnement quant à ses propres compétences, mais aussi une preuve de réalisme face aux lacunes grossières que l’enseignement ne pourra jamais combler, faute de moyens et d’échanges intensifs avec la sphère entrepreneuriale.
Notre rôle consiste à offrir d’emblée une flexibilité importante qui permette de cumuler les exigences d’un premier job avec l’investissement personnel que requiert une formation complémentaire qui vient empiéter sur les temps de loisirs. Cela s’inscrit de façon évidente dans un programme de post-formation qui s’avère indispensable.

Malgré la difficulté d’intensifier les synergies entre l’enseignement et l’entreprise, nous voulons plaider pour une plus grande ‘confusion’ entre les phases d’acquisition des compétences de base et d’entrée effective dans le cadre entrepreneurial. En soi, ce n’est pas franchement surprenant dans la mesure où nous constatons jour après jour à quel point les volets privé et professionnel interagissent pour aller jusqu’à se confondre justement.

A nous de prévoir une transition douce entre la sortie progressive des études et l’entrée dans le monde du travail, en intégrant au plus tôt les talents du futur dans nos organisations désormais conçues comme des communautés ouvertes et en leur donnant la possibilité de prolonger leur cursus tout en générant leurs propres revenus. Cela va bien au-delà de la création d’une première expérience collaborateur positive ou d’une idylle professionnelle fût-elle de courte durée.

Réussir ce passage ‘naturel’ entre l’école et le boulot va déterminer le rapport au travail de nos enfants pour une grande partie, voire l’ensemble de leur carrière. Un rapport fondamental (de nature quasi philosophique) dans la construction de chaque individu, quoi que l’on en dise.

Jean-Paul Erhard

 

Photo : ©Tanguy, le retour – Nac Films

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