93% des entreprises interrogées ne disposent toujours pas d’une politique de réintégration collective leur permettant de prévenir les maladies de longue durée chez leurs travailleurs ou d’aider leurs travailleurs à reprendre progressivement le travail. La mise en place d’une telle politique est pourtant obligatoire depuis octobre 2022. Les causes : 1 sur 4 dit ne pas en voir l’utilité et 1 sur 5 dit ne pas avoir les connaissances nécessaires.
Telle est la conclusion d’une enquête menée dans notre pays par Mensura, le spécialiste de la prévention et du bien-être au travail, auprès de plus de 570 entreprises et 1 300 travailleurs. L’enquête indique en outre que 4 entreprises sur 10 trouvent difficile d’aborder la question de la charge de travail et du stress au travail. « Une occasion manquée d’attirer les jeunes générations », selon le spécialiste de la prévention.
Depuis la fin de l’année 2022, les employeurs de notre pays sont tenus d’élaborer une politique de réintégration collective. Cette obligation s’applique aux grandes et petites entreprises, même si elles n’ont pas (encore) de malades de longue durée parmi leurs travailleurs. L’objectif de cette politique est double : prévenir au mieux les maladies de longue durée et, si un travailleur tombe malade malgré tout, disposer de scénarios permettant la réintégration du collaborateur dès que son état de santé le permet. L’élaboration de ces scénarios n’est pas une tâche facile.
« Pour la plupart des entreprises de notre pays, l’élaboration d’un règlement de travail détaillé et d’une politique de la voiture est une évidence. Ce n’est clairement pas encore le cas pour une politique de réintégration collective. De nombreuses entreprises font de leur mieux et prennent çà et là toute une série d’initiatives. Mais le manque de cohérence entre ces actions bien intentionnées fait que celles-ci ne sont guère efficaces. La réglementation se révèle trop complexe et les entreprises manquent de connaissances. Nous ne sommes donc pas surpris que la plupart des entreprises n’aient pas encore élaboré de politique de réintégration solide, bien que l’inspection du travail ait déjà averti et rappelé à l’ordre plusieurs entreprises. » – Bart Teuwen, expert en absentéisme chez Mensura
Travail adapté
La plupart des organisations disent toutefois avoir une idée des mesures envisageables pour permettre le retour au travail, progressif ou non, des travailleurs en maladie de longue durée. Près de deux tiers des chefs d’entreprise et des responsables RH (65%) déclarent, par exemple, que le travail adapté est une option possible dans leur entreprise. Dans les plus petites entreprises (63%), cette option est certes plus difficile à mettre en œuvre que dans les plus grandes entreprises (86%). Il convient également de noter que les travailleurs eux-mêmes vivent la situation différemment.
« Moins de la moitié (46%) des travailleurs interrogés déclarent que leur entreprise propose un ensemble de tâches adapté après une absence prolongée. La proposition d’un ensemble de tâches adapté est particulièrement difficile à réaliser dans les petites entreprises (de moins de 10 travailleurs) : à peine un peu plus d’un quart (26%) des travailleurs déclarent bénéficier de cette possibilité dans leur PME. Avoir des idées sur un éventuel travail adapté n’est toutefois pas suffisant. En pratique, une réintégration implique beaucoup de choses et mieux vaut s’y préparer. Le fait que seulement 7 % des organisations préparent cette réintégration est inquiétant. Maintenant que nous avons franchi le cap d’un demi-million de malades de longue durée, notre société ne peut plus se le permettre. » reprend Bart Teuwen, expert en absentéisme chez Mensura
Absence de politique d’absentéisme
Une politique de réintégration collective ne se concentre pas uniquement sur la réintégration proprement dite. Elle comprend également des mesures préventives et une approche de l’absentéisme. Le Conseil national du Travail l’a récemment confirmé dans ses recommandations aux entreprises belges. Mais l’enquête de Mensura indique également que pas moins de 8 entreprises sur 10 n’ont aucune politique formelle en matière d’absentéisme. Une telle politique comprend entre autres une vision claire de la réduction de l’absentéisme, des accords, des responsabilités et des procédures à suivre pour l’employeur et les travailleurs. Les petites entreprises – qui représentent la majorité des entreprises en Belgique – sont particulièrement à la traîne : seulement 16 % d’entre elles ont élaboré une politique d’absentéisme. Une occasion manquée dans la guerre des talents.
« Les jeunes générations accordent une grande importance au bien-être au travail. Elles choisissent leur futur employeur en fonction de la mesure dans laquelle la question de la charge de travail et du stress peut être facilement abordée. Si les entreprises veulent attirer des travailleurs plus jeunes, elles ont intérêt à accorder l’attention nécessaire au bien-être au travail, à la prévention et à l’accompagnement adéquat des collaborateurs malades. Des procédures minimales telles que l’enregistrement des absences et le suivi administratif des certificats médicaux ne suffisent pas. Pourtant, à peine un peu plus de la moitié (52%) des travailleurs interrogés dans le cadre de notre enquête disent que leur entreprise prend des mesures préventives suffisantes pour lutter contre l’absentéisme. Prenons l’exemple de la possibilité de discuter de la charge de travail et du stress : selon les travailleurs, ces sujets restent difficiles à aborder dans 4 entreprises sur 10. L’investissement dans la prévention de l’absentéisme a pourtant sa place dans une politique d’absentéisme élaborée, au même titre que des conditions de travail saines et la sécurité (mentale) au travail. » conclut Bart Teuwen, expert en absentéisme chez Mensura
Source: les résultats proviennent de la grande enquête menée sur l’absentéisme par le bureau d’études Indiville pour le compte de Mensura auprès de 1.355 travailleurs belges et de 571 employeurs. Les données des travailleurs et des employeurs ont été pondérées afin d’être représentatives de la Belgique selon le statut, l’âge, le sexe, la langue et le secteur. L’enquête sur l’absentéisme a été réalisée en mai 2024.