Le conseil des ministres fédéral a adopté la semaine dernière les principes devant entourer la reconnaissance des métiers lourds dans le secteur public. La reconnaissance comme métier lourd donnera accès à une pension anticipée et/ou à un montant de pension plus élevé. Les critères concrets n’ont pas encore été définis, mais le ministre des Pensions a la ferme intention de considérer un grand nombre de fonctions de fonctionnaires comme ‘métier lourd’. Les organisations d’employeurs FEB, UNIZO, UCM et AGROFRONT craignent que ce régime très étendu soit à l’avenir également appliqué au secteur privé, avec toutes les conséquences que cela implique.
Les organisations patronales mettent en garde : ne videz pas les réformes des pensions de leur substance par un régime trop étendu en matière de métiers lourds. « On risque là de commettre une erreur historique et de vider de leur substance les réformes des pensions déjà mises en œuvre et en cours, et de déstabiliser bon nombre d’entreprises et leur management par la lourdeur de l’administration qu’un tel système implique. »
« La manière de travailler est fondamentalement erronée. Dans le secteur public, certains régimes préférentiels (les tantièmes préférentiels) ont été supprimés. On veut à présent compenser cette suppression par l’introduction d’un nouveau régime préférentiel (les ‘métiers lourds’), avec un effet de ‘spill over’ sur le secteur privé. La liste des métiers considérés n’a par ailleurs rien à voir avec la ‘pénibilité’ d’un métier. Nous entendons que le Ministre des pensions envisage d’accorder la reconnaissance à l’ensemble du personnel enseignant (sans aucune distinction quant au type d’enseignement ou aux conditions de travail concrètes). Il semble se se satisfaire d’un seul critère comme facteur aggravant : la charge émotionnelle ; ceci est en totale contradiction avec l’accord intermédiaire conclu avec les partenaires sociaux. »
Privilégier une approche individuelle.
Le front patronal poursuit: « L’allongement des carrières risque d’être complètement sapé si nous n’adoptons pas une approche rigoureuse; les organisations d’employeurs ont toujours privilégié une approche individuelle où la capacité de continuer à travailler est évaluée sur la base de l’état de santé concret d’une personne. Elles se sont très honnêtement efforcées, au sein du Comité national des pensions, de trouver des critères objectifs, mesurables et contrôlables pouvant être appliqués collectivement et dont il a été prouvé qu’ils ont un effet sur la santé des travailleurs. La pratique a révélé que de tels critères n’existent pas, sauf peut-être le travail de nuit et une occupation de longue durée en équipes successives.
Le Ministre des Pensions et les syndicats semblent refuser de le reconnaître et continuent à travailler sur un système dans lequel 30% à 50% de tous les travailleurs et fonctionnaires bénéficient d’une reconnaissance comme métier lourd. Tout cela est très éloigné du constat de la Commission européenne selon lequel seul un nombre limité de travailleurs dans les pays européens exercent un emploi lourd ou dangereux : entre 1% et 4% de l’ensemble des travailleurs. Pourquoi les travailleurs et fonctionnaires travailleraient-ils moins longtemps en Belgique que dans les autres pays de l’UE ? »
La FEB, UNIZO, UCM et AGROFRONT restent disposés à poursuivre la concertation. Ils n’envisagent toutefois une prise de responsabilité conjointe que si le système final se concentre sur les personnes exerçant effectivement un métier lourd, avec un effet prouvé sur la santé. « Un régime trop étendu en matière de métiers lourds annulera tous les efforts passés en faveur d’un allongement des carrières. Personne ne souhaite cela, certainement pas la génération qui intégrera notre marché du travail demain. »