Au cours des cinq dernières années, le nombre de travailleurs présentant des problèmes psychiques ou physiques a considérablement augmenté. Un quart des Belges qui travaillent éprouvent des difficultés en se déplaçant, 7,5 % se plaignent (également) de troubles psychologiques. Dans le secteur des services, ainsi que dans l’enseignement, le nombre de personnes présentant des troubles augmente rapidement.

C’est ce que constate le spécialiste de la prévention, de la sécurité et de la santé au travail Mensura, sur la base d’une analyse des données de plus de 320 000 travailleurs belges.

Le bien-être physique et mental n’a jamais fait l’objet d’autant d’attention sur le lieu de travail. Les organisations prennent toutes sortes d’initiatives pour renforcer la santé et la vitalité de leurs collaborateurs sur leur lieu de travail. Elles adaptent par exemple l’organisation du travail, offrent un encadrement à travers des formations et du coaching ou encore mettent en place des lieux de travail ergonomiques. Ces efforts constituent souvent un premier pas dans la bonne direction, mais l’enquête de Mensura démontre que cela ne se traduit pas toujours dans les chiffres. En effet, de plus en plus de Belges évoquent différents troubles dont la plupart sont liés à leur profession.

Première conclusion importante de cette enquête : pas moins de 25 % des travailleurs ont des problèmes moteurs. Il s’agit de troubles au niveau des muscles et des articulations, comme des douleurs dans le cou, les épaules ou le (bas du) dos. Le nombre de travailleurs souffrant de troubles moteurs a augmenté d’environ 22 % au cours des cinq dernières années. C’est surtout lors des 24 derniers mois que cette augmentation est la plus marquée. Les douleurs lombaires (19,3 %), l’arthrose de la colonne vertébrale (6,7 %) et les douleurs à l’épaule (5,1 %) sont les problèmes physiques les plus fréquents.

Les douleurs physiques culminent chez les travailleurs sur écran

Pendant de longues années, les troubles physiques n’ont été associés qu’aux métiers les plus lourds. C’est surtout dans les secteurs de la construction (30,5%), de l’alimentation (29%) et de la chimie (27%) que le pourcentage de travailleurs souffrant de problèmes moteurs reste le plus élevé. L’augmentation la plus importante dans cette catégorie est observée dans le secteur des soins de santé (+36%).

Toutefois, au cours des deux dernières années, nous avons également constaté une forte augmentation au niveau de la population active qui passe plusieurs heures par jour devant un écran, c’est-à-dire les travailleurs sur écran, qui travaillent pour la plupart dans le secteur des services. Le nombre de travailleurs actifs dans le secteur des services présentant des problèmes physiques a augmenté de 40% au cours des cinq dernières années.

Durant la même période, l’augmentation est aussi très marquée dans l’enseignement (+64% en cinq ans), même si les pourcentages y sont encore nettement inférieurs à ceux des autres secteurs.

« Une partie de l’augmentation des problèmes physiques découle directement du travail lui-même. D’une part, les travailleurs exerçant des professions lourdes, comme dans la construction, continuent à travailler jusqu’à un âge avancé. La charge de travail est aussi plus élevée, ce qui les rend plus susceptibles de développer des problèmes moteurs. D’autre part, le travail fréquent sur écran – à la maison ou au bureau – est à l’origine d’un plus grand nombre de douleurs au niveau du cou, de dos et des épaules ces dernières années. Miser sur l’ergonomie permet de prévenir et de réduire les troubles physiques, et a un effet positif sur la productivité, l’humeur et le bien-être général des travailleurs. Cela implique de fournir des équipements ergonomiques, mais aussi d’enseigner et d’encourager des comportements sains, tels que l’alternance entre la position assise et la position debout et la variation posturale. » détaille Barbara Bruwier, experte en prévention ergonomie chez Mensura.

Le nombre de travailleurs présentant des problèmes psychiques augmente

Outre le nombre de plaintes liées à la motricité, le nombre de travailleurs souffrant d’inconfort psychique a également augmenté au cours des cinq dernières années. Une hausse plutôt marquée : il y a cinq ans, 4,2% des travailleurs déclaraient souffrir de problèmes de santé mentale ; en 2023, ils étaient déjà 7,5%. Soit une augmentation de pas moins de 80%! C’est surtout après la crise du coronavirus que le nombre de travailleurs présentant des problèmes de santé mentale a fortement augmenté.

Les taux les plus élevés sont observés dans le secteur public (9,7%), les soins de santé et les services (8,9% chacun). Les augmentations les plus nettes des cinq dernières années ont été enregistrées dans l’enseignement (où 7,3% indiquent avoir des troubles psychologiques) et le secteur public (où c’est le cas pour 9,7% des travailleurs), qui affichent tous deux des taux plus de deux fois plus élevés. La logistique (7,4%) et les services (8,9%) ont également presque doublé au cours des cinq dernières années.

« L’augmentation du nombre de travailleurs souffrant de problèmes de santé mentale découle directement de l’accroissement de la charge de travail, en partie parce que tout le monde est accessible partout, mais aussi parce que la vie dans son ensemble devient plus complexe et plus mouvementée. Travailler de plus en plus en ligne soumet le cerveau à une pression supplémentaire, ce qui complique l’élimination des hormones de stress. Les employeurs sont de plus en plus conscients de l’importance du bien-être mental et physique, et ils réalisent que des indicateurs tels que les conflits, les plaintes liées au stress, etc., sont des signaux importants pour offrir aux travailleurs un meilleur soutien en termes de bien-être. Nous recommandons aux employeurs d’élaborer une politique de bien-être préventif adaptée à leurs besoins en commençant par dresser l’inventaire de leurs risques psychosociaux. Ensuite, ils peuvent mettre en place des actions ciblées pour certains thèmes, départements, groupes cibles… Songez notamment à des ateliers sur la déconnexion, à des parcours de formation pour les cadres afin de rendre les problèmes mentaux abordables ou de renforcer la résilience, et à des coachings sur le stress pour les collaborateurs qui atteignent leurs limites ou qui sont réintégrés après une absence de longue durée. » explique Marie Lamoral, experte en bien-être mental chez Mensura.

Source: Mensura