Éditorial – Épanouissement au travail grâce au leadership: choisir de se consacrer aux autres ou à soi-même?

Question posée lors d’un séminaire récent: faut-il être totalement épanoui et en équilibre, voire en paix avec soi-même, pour être en mesure de veiller au bien-être des travailleurs? La réponse est probablement oui. C’est préférable en tout cas. Comment peut-on absorber les problématiques de nos collègues si nous n’avons pas ni le recul ni la sérénité nécessaires? Problème : en tant que personne, manager ou collègue, nous passons tellement de temps à essayer de nous comprendre nous-mêmes, à nous définir et parfois même à nous réinventer, qu’il est peu évident de se consacrer aux autres. Si ce travail auto-centré se poursuit sans relâche, comment se préparer au mieux pour se concentrer sur celles et ceux qui ont besoin de soutien ?

Ce dont il est question, c’est notre capacité à entrer en relation avec chacune et chacun dans nos organisations respectives. Le cœur du métier du People Management, c’est précisément cela. Il y a des choix de valeurs, des orientations stratégiques, des décisions quotidiennes pour assurer l’efficacité du collectif. Mais avant tout cela, il y a un impératif qui consiste à écouter et comprendre les aspirations de chaque collaborateur afin de pouvoir lui offrir un environnement et un challenge à la hauteur de ses ambitions. Une tâche colossale, chaque jour renouvelée, qui exige idéalement d’avoir résolu les trois questions suivantes.

Intégrer la dynamique de confusion des sphères privée et professionnelle

La réalité du travail aujourd’hui se construit, pour un nombre de fonctions de plus en plus important, sur la manière dont les dimensions personnelle et professionnelle se complètent ou s’entrechoquent.
La confusion s’installe, c’est un fait. Cela veut dire, pour chaque travailleur soucieux de ‘maîtriser’ son rapport à travail : choisir ses heures et ses lieux de travail, mais aussi le niveau d’intimité consentie avec chaque collègue, peu importe qu’il y ait relation hiérarchique ou pas in fine. Chacun.e met le curseur là où cela lui convient, en prenant conscience des avantages et des inconvénients.

En acceptant que les réalités et contraintes privées puissent entrer en collision avec les impératifs liés au boulot, nous entrons dans un niveau supérieur de complexité lorsqu’il s’agit de soutenir un collaborateur. Cela entre plus fort encore en résonance avec nos expériences propres. Et c’est notre tolérance face à des choix et des modes de vie différents qui est mise à l’épreuve. Il faut être prêt à les accepter.

Lutter contre l’égoïsme ambiant, en commençant par soi-même…

Nous devons par ailleurs nous méfier de ce que nous appelons le phénomène de projection. Une erreur que nous commettons fréquemment sur le plan managérial consiste à projeter nos propres ambitions sur des collaborateurs qui n’ont rien demandé. Les pros du People Management sont bien sûr les premiers invités lorsqu’il s’agit de sortir de son petit cercle et d’éviter de tout ramener à soi…

A l’évidence, l’effort est important dans cette période où l’égoïsme est puissant. Que ce soit sous l’effet du repli sur soi ou de l’hypertrophie de l’ego, le ‘moi je’ figure en bonne place sur la liste de nos soucis quotidiens. Essayons donc de ne pas entretenir cette quête de domination personnelle en évitant d’imposer nos référentiels sur ceux de nos pairs (et oui, c’est vraiment très difficile à faire !).

Trouver son point d’équilibre, le travail d’une vie

Pouvoir être totalement concentré sur les autres, cela exige de savoir exactement qui nous sommes, avec nos forces et nos faiblesses. Et de pouvoir s’extraire d’un questionnement existentiel sans fin. Serons-nous un jour réellement prêt, tant il est évident que ce travail de connaissance de soi, suivant les préceptes des philosophes anciens tels que Socrate* n’est jamais terminé ? Comment savoir donc que les conditions réunies pour nous consacrer pleinement à autrui ? A quel moment la magie se produit-elle?

Cela se passe lorsque, dans un élan de générosité, on accepte de ne plus être le centre de la conversation. Attention, ce n’est pas pour autant un don de soi désintéressé. Ce moment correspond à l’expression d’un intérêt authentique à la connaissance de l’autre, dans une démarche quasi scientifique de compréhension des modèles de pensée et des leviers qui animent nos interlocuteurs. Travailler sur l’humain revient ainsi à entamer un processus de recherche sur un matériau vivant qui détient un pouvoir extraordinaire, une compétence rare, une énergie rare…

Pour franchir ce cap, il est bon de savoir qui l’on est. Être heureux, bien sûr cela peut aider même si nous savons que cela ne dure pas nécessairement très longtemps. Savoir et assumer pleinement qui nous sommes, y compris en affichant nos propres limites, est indispensable pour rendre service à celles et ceux qui veulent avancer, grandir, changer, partir, abandonner, revenir, entreprendre…

Au fond, la méthode du leader réceptif aux besoins de ses collaborateurs pourrait être la suivante : « je suis totalement concentré sur les autres parce que je sais exactement qui je suis. » Une idée à creuser, peut-être, encore et encore…

Jean-Paul Erhard

 

en visuel : Socrate –  ‘Connais-toi toi-même’.

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