Éditorial – Bye bye, cher patron… ou les limites d’un leadership fort.

Début de cette semaine: ‘démission’ avec effet immédiat de Carlos Tavares, patron emblématique du groupe automobile Stellantis (ex PSA)… C’est de facto le licenciement d’un CEO adulé jusqu’il y a quelques mois pour son caractère visionnaire et sa maîtrise d’une gestion hyper compétitive. Aujourd’hui, les actionnaires et le personnel regrettent sa méthode parfois brutale, son enfermement et au final des résultats qui ne correspondent plus aux attentes. Personne n’est à l’abri d’un revirement de situation.
Venons-en au leadership… Ce qui nous intéresse ici, c’est de décoder pourquoi et comment nos entreprises se séparent durement des dirigeants et managers qui les transforment positivement. A quel moment un leader devient-il une cible à abattre? A quel moment doit-il comprendre qu’il est temps de céder la place ?

Ce sont, dans la plupart des cas des mâles alpha qui sont concerné, pour le moment du moins. Ils sont dénigrés avec la même ardeur que lorsqu’ils étaient adorés. Comme si du jour au lendemain, il était possible d’avoir perdu son modjo… C’est cruel et, nous pouvons le dire, souvent prévisible.

La star du jour n’est pas la star du lendemain.

C’est le lot de tous les dominants qui règnent, chacun à leur échelle… Tôt ou tard, les dominés vont se rebeller et exiger, sans délai, d’être respectés pour ce qu’ils sont. C’est une mutinerie qui se concrétise souvent par la mise à l’écart manu militari de celui ou de celle qui incarne le pouvoir. Aujourd’hui, avec la contestation des figures d’autorité, la chute des leaders puissants est inévitable.

Pourquoi donc ? Parce que les conditions de marché ont changé. Parce que les attentes des parties prenantes ont évolué. Parce que de nouveaux talents ont émergé. Parce que le leader en question n’a pas veillé à changer de registre lorsque c’était nécessaire ! Même lorsque l’on trône au sommet de la pyramide, il est vital de pouvoir incarner des réponses différentes à des besoins différents. Cultiver l’adaptabilité… Cette capacité à intervenir de manière variable permet d’offrir des réponses nuancées à des équations complexes, là où nos interlocuteurs tentent à tout prix de nous mettre dans des cases. Le meilleur moyen de ‘survivre’ dans un monde en mouvement perpétuel.

Communication, le droit de tout dire (pendant un certain temps) ?

Ensuite, un autre élément central doit être pris en compte : la communication, spécialement quand elle est agressive, génère de la lassitude. C’est le lot de celles et ceux qui veulent être le moteur du changement. Il est sage de comprendre que, tôt ou tard, les équipes n’en peuvent plus de vous suivre. Cela ne signifie pour autant qu’elles exigent un temps de repos. Cela signifie plutôt que l’on ne peut incarner le changement indéfiniment. C’est une question de cycle.

Par ailleurs, pour bouger une organisation, il ne suffit pas de le vouloir de toutes ses forces. Il faut obtenir un minimum d’adhésion et pour cela, la maîtrise de la communication est indispensable. La tentation des leaders forts et charismatiques consiste à bousculer les équipes, à les confronter souvent à une réalité crue et difficile à reconnaître. Ce qu’un leader considère comme un discours de vérité est bien souvent reçu comme une provocation inutile. Peu importe au fond que cela soit vrai ou pas. Ce n’est tout simplement pas agréable à entendre. Dans les faits, il faut bien reconnaître que l’on ne peut pas tout dire, particulièrement lorsque nous sommes aux commandes. L’excès en la matière peut être fatal, et ce même si nous évoluons dans un environnement qui exige une transparence totale.

Des attitudes incompatibles avec les attentes actuelles de nos équipes

Comprenons enfin que le paradigme du leadership a changé. Les modèles top-down ont vécu. Prenons l’exemple de la pédagogie et de la transmission qui fait partie des rôles du leadership. Le schéma classique, basé sur la relation entre le détenteur du savoir et l’apprenant, ne fonctionne plus. L’apprentissage passe aujourd’hui par la réflexion alimentée par les tiers et par nos proches en priorité. C’est une démarche fondée sur le dialogue et l’interaction.

Comment procéder? Mettre les gens ensemble, parce qu’ils vont développer une expérience collective, atteindre un but commun (même peu ambitieux) et apprendre les uns des autres.
Le leader a pour mission de créer ces occasions. Est-il devenu, à l’insu de son plein gré, un organisateur d’événements? Un peu, oui. Le charisme reste important, nul ne le conteste. Il ne vaut toutefois que s’il permet à d’autres charismes de s’exprimer et de rayonner.

Les contradictions apparentes se multiplient, et menacent sérieusement les managers qui misent sur la puissance et la personnalité. Comment faut-il l’entendre? Une invitation, une de plus, à l’humilité?
Difficile de vivre dans la discrétion lorsque l’attente générale consiste à disposer d’un référent – voire d’une icône – vers lequel on peut se tourner lorsque l’on veut savoir quelle est la bonne direction à emprunter.
Nous ne sommes jamais aussi fragiles que lorsque nous atteignons le sommet. Au menu là-haut, il y a l’isolement, l’exposition, la prise de risque, autant de réalités qui mobilisent la force. Il y a aussi désormais la disponibilité, l’écoute et un principe simple qui consiste à se mettre au service d’un objectif plus grand que soi-même. Un superbe exercice.

Jean-Paul Erhard

 

Photo ©afp.com – crédit F. Florin

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