Obtenir un nouveau dynamisme en matière d’emploi et de formation en tapant au portefeuille des employeurs et de la main d’œuvre disponible? Et passer par une nécessaire réduction du coût du travail pour redonner du souffle à nos entreprises? Ce n’est pas la voie à suivre.
Une nouvelle réforme du marché du travail ne ramènera pas les malades de longue durée dans les murs de nos entreprises. Elle ne servira pas davantage de levier pour les demandeurs d’emploi qui ne parviennent pas à s’y insérer.

Il est bon de rappeler que le travail ne dépend pas que des données financières. Ce dont nous avons grand besoin aujourd’hui pour stimuler l’emploi dans toutes les organisations privées et publiques, grandes et petites, c’est de flexibilité personnelle, de cohésion collective et d’envie partagée. Et c’est précisément ce que souhaitent toutes les parties concernées par le travail au quotidien. Raison pour laquelle il n’est pas nécessaire de nous imposer une nouvelle réforme du marché du travail.

Nous pensons que les planètes sont alignées… Les attentes des travailleurs et des employeurs se rejoignent, quoi qu’en disent les nombreux observateurs (dont les syndicats) qui passent leur temps à les opposer – et nous le comprenons puisque ces prétendus antagonismes les font vivre! -.

L’entreprise intègre de mieux en mieux le bien-être et la quête d’équilibre entre vie privée et vie professionnelle dans son organisation quotidienne. Tout n’est pas parfait, c’est évident. Mais les progrès sont remarquables dans tous les secteurs d’activité. Et les travailleurs de leur côté répondent très souvent aux besoins d’agilité que leurs employeurs rencontrent pour satisfaire leurs clients, à partir du moment où ils les comprennent !

On ne peut réduire le marché du travail à une question de coût pour les employeurs.

Se focaliser sur le coût du travail est compréhensible, compte tenu du contexte macro-économique, mais cela reste futile voire déplacé lorsqu’on évolue dans la réalité du quotidien. Cela n’impacte pas la rentabilité de nos entreprises de manière significative.

Plus fondamentalement, la démarche qui précède l’élaboration d’une réforme se base sur des postulats erronés, à commencer par celui qui laisserait croire que les employeurs ne se sentent pas concernés par le financement de la sécurité sociale. Que du contraire! La contribution à la solidarité sociétale, par le biais de la création d’activités rentables et des emplois qui les soutiennent, est au cœur de la plupart des projets entrepreneuriaux.
La diminution du coût du travail n’est pas la formule magique qui va redynamiser les acteurs du marché. Cela passera par la créativité, l’énergie, la gestion rigoureuse des acteurs de terrain et les moyens que nous inventons pour les stimuler.

Des enjeux de flexibilité à négocier en permanence

Puisque la transformation du marché du travail ne passera pas par une réforme administrative, où allons-nous chercher de nouvelles marges de progrès?
Actuellement, nous rencontrons encore des situations concrètes dans lesquelles l’entreprise n’est pas autorisée à bouger son organisation pour répondre aux besoins de flexibilité de ses collaborateurs. Nos réglementations devraient prendre en compte le ‘transfert’ de la quête de flexibilité qui s’est déplacée pour être aujourd’hui très ancrée auprès des travailleurs.

L’essentiel du travail à mener consiste donc à nous libérer des contraintes qui nuisent à la qualité des relations entre le management et les collaborateurs. La personnalisation des conditions de travail, des trajets de développement personnel et des outils de rémunération est possible. Bien sûr, il y a des désaccords et des conflits mais au fond, seule notre disponibilité vis-à-vis de celles et ceux qui ont besoin d’écoute et d’empathie est vraiment mise à l’épreuve. Rien d’insurmontable.

Réconcilier et rassembler sans cesse pour que l’entraide redevienne naturelle

Nous avons une occasion rêvée… et la responsabilité de ne pas la gâcher lamentablement. Un des dangers auxquels nous sommes souvent confrontés est le suivant : l’analyse et la compréhension du marché du travail nous pousse souvent à la segmentation. Nous avons besoin d’organiser nos connaissances. Cela crée des catégories et des tensions, sans que nous puissions toujours prendre conscience des effets indésirables en matière de discrimination.

Différents comportements de travailleurs coexistent sur le marché. Il y a celles et ceux qui, chaque jour, se rendent au boulot avec des motivations variables. Il y a aussi celles et ceux qui s’en sont éloignés dès que leurs corps ou leurs esprits leur ont envoyé un signal d’alerte. Il y a enfin celles et ceux qui aimeraient y entrer…
Certain.e.s surfent aisément sur les difficultés inhérentes à un monde ultra-compétitif. D’autres n’y arrivent pas. La menace et l’exclusion ne les ramèneront pas durablement dans une démarche partagée. Nous devons rassembler les forces et poursuivre la transformation positive qui est déjà en cours. Tous méritent la même considération et de se voir offrir l’opportunité de trouver une place unique, à hauteur de leurs moyens et de leurs compétences, dans la dynamique de l’ensemble.

Jean-Paul Erhard