Le cash est de retour au centre des conversations. Situation prévisible compte tenu de la terrible pression qui s’exerce sur le pouvoir d’achat. L’argent retrouve sa position centrale dans nos stratégies RH. Enfin!
Au beau milieu de la crise du Covid (qui s’en souvient encore?), nous avons insisté sur l’absolue nécessité de placer la question des rémunérations au sommet des priorités. Nous y sommes et cela ne va pas être simple…
Car, l’argent et la gestion des rémunérations est à coup sûr le volet sur lequel nos entreprises communiquent le moins, alors que le besoin de pédagogie et d’accompagnement y est certainement plus prégnant que sur n’importe quelle autre discipline inhérente au People Management. Une fois encore, prenons notre courage à deux mains et inspirons-nous de la franchise et de la facilité avec laquelle nos collaborateurs abordent aujourd’hui un thème qui n’a plus rien d’un tabou.
Le postulat de départ est le suivant: parler ouvertement d’argent est normal et nécessaire. A noter que c’est avec une certaine délectation que nous avons pris connaissance de plusieurs études récentes visant à démontrer que le cash reçu à la fin du mois est redevenu prioritaire pour la génération Z.
Nous avons déjà affirmé ici que les valeurs écologiques et le ‘sens’ au travail que l’on disait fondamentaux pour les jeunes générations ne résistent pas à l’épreuve du temps et qu’il suffisait d’attendre que nos petits chatons soient rattrapés par la parentalité, l’achat immobilier et les crédits bancaires pour que les contingences matérielles reprennent le lead de leurs préoccupations.
Ces constats récents ne doivent donc pas nous surprendre. L’information essentielle, c’est l’absence de retenue, voire de pudeur, qu’il y a désormais sur le sujet. Les travailleurs en parlent librement. C’est moins le cas en ce qui concerne les dirigeants de nos entreprises.
Transparence salariale, une évidence.
A cet égard, la mise en application de la directive européenne sur la transparence salariale doit être un non-événement. Cette directive, au-delà de son impact souhaité en matière d’égalité des genres, va impulser une pression positive sur la cohérence et l’équité des politiques de rémunérations au sein de nos entreprises.
Bien mise en œuvre, elle peut même être une aide réelle à la bonne gestion. Elle permet d’éviter de créer des décalages au sein des équipes et peut nous forcer à expliquer les différentiels lorsqu’ils existent (parce que, oui, ils peuvent exister !). La difficulté reste quant au différentiel important qui existe souvent entre la valeur réelle et la valeur perçue d’un package de rémunération, mais le principe de transparence et d’ouverture du champ de la communication est vertueux. Allons-y sans réserve donc !
Transparence des résultats financiers, une nécessité.
Parler de l’argent des collaborateurs, c’est utile et franchement indispensable désormais. Mais, nous devons aussi parler de l’argent de l’entreprise.
Car nombreux sont celles et ceux qui ont ‘oublié’ le lien immédiat qu’il y a entre les deux! Nous n’évoquons la plupart du temps que les coûts du travail, en regrettant leur poids relatif sur le fonctionnement. Cela ne nous mène pas très loin.
Que faire dès lors ? Rappeler que la rentabilité de nos entreprises reste la première des conditions pour offrir des rémunérations adaptées. Rappeler que cette rentabilité ne dépend que de la qualité de nos prestations. Rappeler que la capacité à créer un collectif est le facteur qui permet de distinguer les entreprises qui résistent à l’épreuve du temps et celles qui s’éteignent doucement. Rappeler enfin que les résultats financiers ne sont pas le résultat de formules comptables magiques mais bien l’addition voire la multiplication de nos performances quotidiennes. Pouvoir enfin expliquer comment les profits générés par l’activité seront redistribués… Autant de lieux communs que nombre de travailleurs ont oubliés parce que nous n’en parlons pas (assez).
La rémunération comme pilier de la politique RH, pour combien de temps encore?
Nous avons sans doute besoin d’ouverture et de pédagogie. Sur le plan des RH, il faudra de l’humilité aussi… Car la donne n’a pas vraiment changé malgré la diversité des activités et processus qui étoffent la pratique du People Management, année après année. Le Payroll reste la pierre angulaire.
N’en déplaise à celles et ceux qui se mobilisent pour développer des projets de développement personnel ambitieux, l’argent est sans doute redevenu le juge de paix, celui qui détermine si la stratégie RH d’une entreprise est performante ou pas.
Est-ce que cela va durer longtemps encore? Le temps d’une crise, qui succède à une crise, succédant elle-même à une autre crise… Le flux continu des événements contraires est un appel à la sécurité financière et à l’épargne. Il y a un enjeu essentiel dans nos organisations désormais, et plus spécifiquement encore au sein de leurs départements RH : il s’agit de connecter la gestion des rémunérations de manière très concrète à l’ensemble des défis posés en matière de People Management. Du recrutement au suivi de la performance, en passant par le bien-être, la formation ou la mobilité interne, chaque étape du parcours professionnel de nos collaborateurs devrait correspondre à une évolution du package salarial (et les possibilités d’agir sont quasi illimitées). Une simple question de cohérence, au final.
Jean-Paul Erhard

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