Editorial – « Cliquez ici et rencontrez des employeurs qui respectent vos priorités! » (ou quand la guerre des talents vous fait dire n’importe quoi…)

Voici la punchline ou plutôt la promesse annoncée par un portail de recrutement pour clôturer les spots de sa communication mass média… Nous avons failli nous étrangler lorsque nous avons entendu ce message pour la première fois. Puis, en réfléchissant, il a fallu réaliser que malheureusement, il est possible que cela fonctionne! Pourtant, cette affirmation – des employeurs qui respectent vos priorités! – n’est ni réaliste, ni souhaitable. On n’entame pas une relation de travail sur un engagement qui ne pourra pas être tenu dans tous les cas. C’est l’occasion de rappeler que tous les arguments ne sont pas bons pour attirer les talents dans nos filets. Et d’expliquer pourquoi celui-ci est si peu approprié…

Même si ce n’est que de la communication publicitaire, diffusée et oubliée en un instant, et dont le seul objectif consiste à capter l’attention, nous ne pouvions pas laisser passer. Attirer les candidats au voyage et leur promettre la lune, sans y avoir jamais posé la moindre empreinte, c’est pratiquer le jeu de la séduction dans ce qu’il a de plus détestable et court-termiste.

Sur un malentendu, ça ne peut pas marcher.

Dans le climat de défiance actuel, sur un marché qui flirte avec le plein emploi malgré le nombre affolant de personnes désormais inaptes à travailler, peut-on encore se permettre de décevoir nos collaborateurs avec des promesses absurdes? Car malgré toute l’importance de ce que nous appelons l’Expérience Collaborateur, l’employeur n’a pas de contrainte à prendre en compte vis-à-vis des ‘priorités’ de ses collaborateurs. Faire et laisser croire aux travailleurs qu’ils peuvent imposer leurs priorités est pernicieux.

Comprenons-nous bien : ce qui est sous-entendu ici, ce sont les besoins personnels, ceux qui appartiennent à la sphère privée, qui devraient être respectés.
L’entreprise doit-elle tenter de les prendre en compte ? Absolument. Est-elle obligée de le faire ? Pas du tout. Les employeurs qui y parviennent sont-ils nombreux ? Vraiment pas. Ils subissent pour la plupart les impératifs des travailleurs qui pensent pouvoir dicter le rythme de la collaboration, au prix d’une relation qui se détériore. Cela manque clairement de concertation…

Conséquences ? Une loyauté faible, un engagement limité…

Au final, la réponse aux attentes diverses et variées des unes et des autres n’est jamais parfaite. Et le petit jeu qui s’installe entre les talents et l’organisation consiste à tester les limites du système. Vient tôt ou tard le moment du désaccord, fondé sur le sentiment profond que les engagements mutuels n’ont pas été respectés. Constat d’échec.

Dès la première rupture d’une confiance que nous savons fragile, quelles sont les options disponibles? La plus simple et la plus frontale, c’est la fin de la collaboration marquée par le départ du travailleur. C’est un recrutement raté. Pas d’attachement ni de loyauté à honorer. Pas de drame. Disons qu’on s’est mal compris et qu’on n’est pas fait pour vivre ensemble. On se quitte et on s’oublie.

Mais ce n’est pas la seule forme de ratage en matière de recrutement : certains collaborateurs sont en désaccord avec leur employeur mais restent néanmoins dans les murs avec un niveau d’engagement qui plonge dans les ténèbres. C’est une nouvelle histoire, inintéressante et interminable, qui commence. Décourageante. Pénible. Toxique.

C’est le collectif qui prime, avant les priorités individuelles.

Comment éviter ces issues regrettables? Ne rien laisser hasard dès les premiers jours, voire même bien avant encore, équivaut à garantir une clarté absolue sur la ‘hiérarchie’ des besoins et priorités auprès de chacun.e. En quelques mots tout simplement : le collectif avant tout, l’individuel ensuite à chaque fois que cela sera possible.

Dans un monde idéal, nous pourrions imaginer que les priorités de l’un (le collectif) et les priorités des autres (les individus) vont coïncider ou se répondre. Au fond, c’est à cela que sert l’analyse du cultural fit entre le travailleur et l’entreprise ainsi que l’alignement sur les valeurs corporate au moment du recrutement. La réalité du terrain nous contredit parfois, voire souvent.
Nous devons aller plus loin. Le deal qui consiste à privilégier les besoins du collectif doit être annoncé, puis écrit et confirmé dans nos pratiques quotidiennes.

La ‘guerre des talents’ que se livrent les acteurs du marché du recrutement n’aide personne. A force de multiplier les fausses promesses, nous posons toutes les fondations d’une méfiance durable entre les travailleurs et leurs employeurs. Comment renoncer aux arguments trompeurs et autres grosses ficelles utilisées pour aguicher les meilleurs talents? Le meilleur remède reste l’authenticité… et le développement d’une forme de pédagogie pour que celles et ceux qui nous rejoignent apprennent à nous aimer aussi pour nos (petits) défauts.

Jean-Paul Erhard

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