Éditorial – Entrer dans l’économie du burn-out? L’épuisement n’est ni une preuve d’engagement, ni un passage obligé.

Fin de l’année dernière, le rapporteur spécial de l’ONU aux droits de l’homme et à la pauvreté, Olivier Deschutter, évoque l’émergence de l’économie du burn-out. Rentabilité immédiate, quête de productivité et outils numériques installent une pression psychologique insoutenable et rejettent les travailleurs faibles et peu qualifiés en périphérie de la croissance. Qui peut dire que ce n’est pas une réalité majoritaire? Le constat est dur : malgré tous les efforts déployés en matière de ‘modernisation’ du management, et les améliorations qui en découlent, la question de l’aliénation au travail reste posée. Entamons donc une nouvelle réflexion ensemble.

L’économie du burn-out, c’est quoi ? Un monde du travail qui s’essouffle chaque jour davantage, et qui avance inexorablement vers des ruptures brutales parce qu’il a besoin d’un ‘reset’ régulier afin de pouvoir continuer à avancer. Ce sont des chocs violents qui sont nécessaires et qui font aussi beaucoup de dégâts, à commencer sur le plan humain.

La pression aux résultats peut-elle encore être ressentie positivement ?

Le levier de la performance et du dépassement de soi fonctionne-t-il encore ? Un travailleur se réalise-t-il aujourd’hui parce qu’il affiche d’excellents résultats ou parce qu’il est simplement le meilleur en terme de prestations ? Non, ce n’est plus suffisant.
Depuis quelques années déjà, le volet social / relationnel est venu compléter le tableau. Être un bon équipier est au moins aussi important que d’être un collègue compétent et efficace. Bien sûr, les deux dimensions se complètent. Elles ne se substituent pas l’une à l’autre.
La performance reste mobilisatrice pour autant qu’elle soit assortie du plaisir, de l’appartenance et de la cohésion. Elle doit aussi être désormais justement récompensée. Il est possible de rendre la pression aux résultats supportable puis attractive. Pour cela, nous devons intégrer dans nos raisonnements un principe hyper simple: rentabilité = partage. Les fruits de la croissance doivent être mieux répartis entre celles et ceux qui y contribuent activement. C’est la condition à la survie du modèle.

Dans chaque entreprise, une vision partagée de la santé et de l’équilibre

Il reste difficile de s’entendre sur l’origine de la pression qui s’exercent sur les collaborateurs… Bien sûr, des entreprises et des managers toxiques et/ou indifférents au bien-être des travailleurs existent encore. Mais il y a aussi un nombre significatif de collègues qui sont passés maîtres lorsqu’il s’agit de générer leurs propres névroses. Certain.e.s n’ont besoin de personne pour surinvestir un job ou une responsabilité qui n’en demandaient pas tant.

Même si chacun.e est responsable de trouver et de veiller au maintien de son propre équilibre, c’est à l’entreprise qu’il appartient de proposer une balance appropriée en matière de gestion croisée des sphères privée et professionnelle. Pour y arriver, il faut aider à résoudre les conflits de loyauté que les travailleurs éprouvent envers les rôles qu’ils remplissent dans leurs organisations, dans leurs familles et au sein de leurs communautés.
Reconnaître pour commencer que nous avons une façon de valoriser la capacité à enchaîner des horaires de travail ‘extraordinaires’ qui n’arrange rien… Et installer dès que possible une culture autorisant chacun.e à percevoir les signaux précoces de décrochage auprès des collègues directs pour tirer la sonnette d’alarme avant qu’il ne soit trop tard. Prendre soin les uns des autres, simplement.

Ce n’est plus seulement une question de confiance…

Dans cette ‘économie du burn-out’, nous devons composer avec un climat détérioré au travail. Nous avons récemment franchi de nouveaux paliers en matière de méfiance généralisée entre employeurs et travailleurs. Peu importe finalement les termes utilisées pour décrire le manque de confiance entre les parties. Perte de sens pour les uns, expérience collaborateur désastreuse pour les autres, non respect des engagements mutuels pour ceux qu’il reste…

Soyons lucides : la confiance ne suffit plus. L’inspiration pas davantage. Elles ne permettent pas de supporter longtemps des charges de travail exceptionnelles qui provoquent des sacrifices incompréhensibles, même si le projet d’entreprise est formidable.
L’épuisement n’est pas un passage obligé dans une carrière, inévitablement soumise à des hauts et des bas. Ce n’est pas davantage la seule et unique preuve d’un investissement total vis-à-vis de la mission qui nous a été confiée.
Il n’est pas question de renoncement ni de souffrance lorsque nous nous engageons dans une relation de travail. Il est au contraire question de promesses à tenir de part et d’autre… et d’un contrat qu’il est bon de renouveler régulièrement pour qu’il évolue et grandisse au même rythme que nous.

Jean-Paul Erhard

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