Le fossé entre l’offre et la demande de compétences ne cesse de grandir. Nous ne sommes peut-être que dans une première phase de pénurie…

Menée sur 43 pays dont la Belgique, l’enquête mondiale réalisée par ManpowerGroup au sujet des pénuries de talents met en évidence les difficultés de recrutement rencontrées par les employeurs. Le marché de l’emploi est en pleine transformation sous la poussée de la digitalisation et des nouvelles technologies. Les créations d’emplois s’accélèrent. Mais dans le même temps, le fossé entre l’offre et la demande de compétences ne cesse de grandir.

« Les pénuries de talents atteignent un nouveau record en Belgique et dans le monde et hypothèquent la croissance des entreprises. » explique Philippe Lacroix (ManpowerGroup). « Le paradoxe du ‘talent mismatch’ qui caractérise notre marché du travail depuis de trop nombreuses années a encore été mis en évidence lors de la publication des chiffres de vacance d’emploi par Eurostat. Avec un taux d’emplois vacants de 3,5% au 1er trimestre de cette année, notre pays se situe nettement au-dessus de la moyenne européenne, établie à 2,2%. Dès lors, le mot d’ordre sur le marché de l’emploi ne doit plus être seulement ‘jobs, jobs, jobs’ mais également ‘skills, skills, skills’. Le plan que le gouvernement mettra bientôt en place pour lutter contre les pénuries de main-d’œuvre ne devra pas se limiter aux seules compétences techniques (hard skills) ou fonctions critiques, mais également aux fameuses ‘soft skills’ liées à la personnalité. Ces compétences douces – capacité à collaborer, résolution de problème ou communication – seront déterminantes dans le monde digital où l’homme et les robots devront interagir et où le travail se réinvente. » 

Les conclusions de l’étude confirment des constats déjà relevés auparavant, en insistant sur la portée mondiale et le caractère de plus en plus significatif des pénuries de talents dans certaines filières. Quelles sont-elles?

1. Des difficultés de recrutement accrues. – Au niveau national, 35% des 754 employeurs interrogés par ManpowerGroup déclarent avoir des difficultés à remplir leurs postes vacants, un chiffre en augmentation de 11% par rapport à la dernière édition de l’enquête réalisée en 2016. Malgré des dynamiques différentes sur les marchés de l’emploi, le manque de main-d’œuvre se fait ressentir dans les trois régions du pays et touche 38% des employeurs en Flandre (hausse de 7%), 35% à Bruxelles (hausse de 13%) et 30% en Wallonie (hausse de 17%).

2. Les métiers techniques dans le top 10 des fonctions critiques. – En tête du classement établi à partir des réponses reçues sur la base d’une liste de 150 métiers, on trouve les ouvriers qualifiés (électriciens, soudeurs, maçons etc.), suivis par les techniciens (maintenance, production) et les chauffeurs en 4e position. Les experts sont également fortement représentés : profils comptables et financiers (3e), ingénieurs (8e) et profils IT (9e). Comme chaque année, les commerciaux (5e) et les profils administratifs (6e) figurent dans le Top 10 des fonctions les plus recherchées. On note également l’apparition des fonctions de profils d’experts (7e), qu’il s’agisse des project managers et des juristes. L’évolution des modes d’organisation des entreprises a renforcé le rôle des project managers qui doivent posséder de nombreuses compétences, notamment au niveau des soft skills. Enfin, le personnel Horeca (10e) fait sa réapparition dans le Top 10 des fonctions critiques établi par ManpowerGroup.

3. Le défi s’accroît avec la taille des entreprises. – Les grandes entreprises (≥ 250 travailleurs) éprouvent deux fois plus de difficultés à trouver du personnel qualifié que les micro-entreprises (< 10 travailleurs). En effet, 64% des employeurs des grandes entreprises déclarent être confrontés aux pénuries de talents contre 31% des petites PME.

4. Quelles difficultés à trouver les bons profils ? – Alors que les entreprises se digitalisent, s’automatisent et se transforment, trouver le bon équilibre entre les compétences techniques et les compétences liées à la personnalité est devenu le défi principal lors du recrutement. Et pourtant, 34% des employeurs estiment que les candidats ne possèdent pas ces compétences nécessaires (20% se plaignent de l’insuffisance de ‘hard skills’ et 14% du manque de ‘soft skills’). « Ce constat met en évidence la faiblesse de notre main-d’œuvre à la sortie de l’enseignement, mais aussi l’insuffisance de compétences accumulées en cours de carrière, en raison d’un manque de mobilité ou de formation permanente ».»

5. Priorité à la formation et au recours à d’autres types de main-d’œuvre. – Les RH doivent occuper un rôle central en mettant en place une nouvelle culture de l’apprentissage, gage d’une meilleure performance pour l’entreprise et d’une employabilité accrue pour les collaborateurs. L’enquête de ManpowerGroup montre que les entreprises ont clairement compris l’importance de miser sur la formation et le développement des compétences (56%).

6. Un problème mondial ? –  Au niveau mondial, 45% des 43.000 employeurs interrogés par ManpowerGroup dans 43 pays et territoires déclarent avoir des difficultés à trouver le profil adéquat. Les pays les plus touchés sont dans l’ordre : le Japon (89%), la Roumanie (81%) et Taiwan (78%). Les Etats-Unis (46%) se situent au niveau de la moyenne mondiale, tandis que la Chine est le pays le moins touché (13%). Les pays européens ne sont pas épargnés et les employeurs éprouvent des difficultés de recrutement à des degrés divers en Allemagne (51%), Suède 42%), Italie (37%), Suisse (33%), France (29%), Espagne (24%), Pays-Bas (24%) et Royaume- Uni (19%).

 

Source : ManpowerGroup

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