L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes et le SPF Emploi, Travail et Concertation sociale viennent de publier le rapport 2016 sur l’écart salarial. Celui-ci confirme un des principaux enseignements de notre dossier consacré à l’égalité des genres : la réduction de l’écart salarial est lente, très lente…
Le rapport montre qu’en 2013, une femme gagnait en moyenne 8% brut de moins par heure qu’un homme en Belgique. Sur base annuelle, et donc en tenant compte du travail à temps partiel, l’écart salarial s’élevait en moyenne à 21%. Ces chiffres représentent une amélioration d’1 point de pourcent par rapport au rapport précédent.
Les fonctions typiquement féminines sont généralement moins bien payées, ajouté à cela les données de l’écart salarial en salaires horaires, la discrimination salariale est incontestable : les femmes sont parfois moins rémunérées pour le même emploi. L’écart salarial au niveau des salaires annuels est principalement dû au fait que les femmes travaillent plus à temps partiel que les hommes. Etant donné qu’elles prestent moins d’heures, le salaire annuel brut moyen des femmes est beaucoup moins élevé que celui des hommes.
• Selon le rapport 2016, l’écart salarial diminue en Belgique, mais très lentement. L’écart salarial sur base annuelle reste très élevé : 21% en 2013 ; en 2009, il était de 23%.
• L’écart salarial le plus important est observé dans le secteur des transports aériens (33%).
• L’écart salarial au niveau des avantages extra-légaux augmente considérablement. Les contributions pour les pensions complémentaires sont en moyenne 38% moins élevées pour les femmes que pour les hommes. L’intervention dans les déplacements domicile-lieu de travail est en moyenne 14% moins élevée pour les femmes.
• L’écart salarial augmente chez les personnes disposant d’un plus haut niveau de formation. L’écart salarial est le plus élevé parmi les personnes hautement diplômées, à savoir 17% dans l’industrie et les services marchands.
Avec un écart salarial sur base horaire de 8%, la Belgique est bien inférieure à la moyenne européenne de 16%. Cela ne doit cependant pas nous faire perdre de vue les défis à venir. L’écart salarial entre les sexes est profondément enraciné, et ne peut être abordé que par une stratégie à long terme, à différents niveaux de pouvoir et en coopération avec les partenaires sociaux.
« L’une des manières de lutter contre l’écart salarial consiste à déposer plainte. Une femme a par exemple effectué cette démarche en 2015 auprès de notre service juridique. Elle-même directrice, elle avait constaté que tous les directeurs masculins au sein de son entreprise disposaient d’une échelle de rémunération supérieure à la sienne et qu’une autre employée de la société s’était vue attribuer une catégorie de fonction inférieure à celle d’un collègue masculin. De plus, lorsqu’un nouveau collègue masculin fut engagé pour la remplacer, il s’est vu attribuer une catégorie de fonction supérieure. Enfin, aucune femme directrice de cette entreprise n’était affiliée au plan de pension complémentaire auquel étaient affiliés certains membres du personnel de la Direction. Il faut donc être vigilant, au sein de son entreprise, aux différences de salaires mais aussi aux différences d’avantages extra-légaux entre les femmes et les hommes. Les différences salariales peuvent survenir à tous les niveaux : l’Institut a également reçu une plainte introduite par une ouvrière. Dans l’entreprise où cette dernière travaillait, toutes les ouvrières gagnaient considérablement moins que leurs collègues masculins. Malheureusement, ces plaintes restent exceptionnelles, car les travailleurs ont rarement accès et connaissance des salaires perçus par leurs collègues. » ajoute Michel Pasteel, directeur de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes.
« L’écart de soins » responsable du travail des femmes à temps partiel
Les grandes différences observées entre l’écart salarial calculé sur base des salaires horaires bruts moyens et celui calculé sur base des salaires annuels bruts moyens sont principalement dues au fait que les femmes travaillent plus à temps partiel que les hommes.
45% des travailleuses, soit près d’une sur deux, travaillent actuellement à temps partiel. Chez les hommes, ce pourcentage est de 10%. Depuis 1999, l’emploi à temps partiel a fortement augmenté tant chez les femmes (+12%) que chez les hommes (+54%). Mais ce sont bien entendu les femmes qui sont touchées par ce phénomène.
Or, le travail à temps partiel des femmes est responsable d’une grande partie des inégalités sur le marché du travail. Il est lié aux attentes stéréotypées tant de l’enseignement que sur le marché du travail et à la ségrégation : de nombreux métiers exercés par des femmes sont organisés dans une optique de temps partiel, par exemple le nettoyage. Pourtant, c’est principalement « l’écart de soins », c’est-à-dire la répartition inégale des tâches liées aux soins, qui pousse les femmes à travailler à temps partiel. La moitié des femmes actives à temps partiel optent pour le travail à temps partiel pour des raisons liées à la conciliation avec la vie familiale. Ce qui n’est le cas que pour 26% des hommes actifs à temps partiel.
La loi relative à l’écart salarial
La loi du 22 avril 2012 visant à lutter contre l’écart salarial entre hommes et femmes a été créée afin de pouvoir mieux combattre l’écart salarial. Cette loi prévoit des actions à tous les niveaux du marché du travail : au niveau interprofessionnel, l’obligation pour tous les partenaires sociaux de négocier des mesures de lutte contre l’écart salarial ; au niveau sectoriel, l’introduction de classifications de fonctions sexuellement neutres et, enfin, au niveau des entreprises, l’organisation d’une concertation obligatoire et l’adoption d’un plan d’action.
La loi relative à l’écart salarial oblige les entreprises à effectuer une analyse détaillée de leurs salaires, ce qui permet de détecter plus facilement l’écart salarial. En 2015, les entreprises ont analysé pour la première fois les salaires de leurs travailleurs dans le contexte de la loi du 22 avril 2012.
Les travailleurs qui pensent être victimes de discrimination salariale ou d’autres formes de discrimination fondée sur le sexe peuvent le signaler à l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, soit en appelant le numéro gratuit 0800/12.800 ou en complétant le formulaire de signalement qui se trouve sur son site internet.
Les chiffres du rapport 2016 sur l’écart salarial concernent l’année d’enquête 2013 et ont été fournis par la Direction générale Statistique – Statistics Belgium du Service public fédéral Économie, PME, Classes moyennes et Énergie et le Bureau fédéral du Plan, et calculés conformément aux indicateurs européens. Tous les chiffres et les tendances du rapport L’écart salarial entre les femmes et les hommes en Belgique. Rapport 2016 sont disponibles sur le site web http://igvm-iefh.belgium.be.