Décembre 2020 est entamé. Dixième mois de crise. A moins d’être sourds et aveugles, nous entrons doucement dans une période au cours de laquelle nous pourrons affirmer que nous disposons désormais du recul nécessaire… Finies les prédictions aléatoires. Nous voyons bien maintenant vers quoi nous nous dirigeons, à tout le moins en ce qui concerne l’organisation du travail de demain. Un rapide point de situation sur ce que nous conserverons de ces aller-retours entre confinement, déconfinement, post-confinement…
Peu importe finalement que nous n’ayons pas anticipé les adaptations contraintes et forcées que nous pouvons constater dans nos entreprises. La réalité nous a dépassé. Plusieurs tendances lourdes – autant de débats ou d’évolution en gestation – sont désormais installées. Reste à savoir à présent si nous serons capables de les gérer.
Triple crash test
Depuis le mois de mars dernier, nous sommes en train de mener de front trois crash-tests majeurs afin de déterminer l’allure que prendra l’organisation du marché du travail de demain: le management virtuel, la mobilité durable et le revenu universel.
Ce ne sont pas des problématiques nouvelles. Ces thèmes figuraient bien avant la crise sanitaire en bonne place parmi nos préoccupations dites ‘stratégiques’. Mais la pandémie a donné un nouveau tempo aux bouleversements attendus, avec pour conséquence que nous avons dû mettre en oeuvre de nouvelles solutions organisationnelles, sans savoir vraiment si nous avions les ressources humaines adéuates et les moyens financiers nécessaires pour trouver un nouvel équilibre.
Soit. Nous y sommes.
Primo, que nous le voulions ou pas, les équipes devront désormais – au moins partiellement – être gérées à distance, ce qui nous obligera à redoubler de créativité pour inspirer les collaborateurs qui évoluent quelque part, en périphérie de l’entreprise.
Secundo, il vaut mieux nous préparer également à revoir de fond en comble la gestion de la mobilité au sens le plus large qui soit. Tous les modèles ont explosé, sans pour autant permettre à nos sociétés de faire un pas de géant vers une pratique plus responsable pour notre environnement. En effet, le renoncement à nombre de déplacements inutiles est malheureusement ‘compensé’ par des comportements de mobilité plus égoïstes que jamais pour d’évidentes raisons de sécurité sanitaire.
Et tertio, sans revenu garanti par l’Etat, une part considérable de la population active ne serait pas à même de vivre décemment. Nul ne prononce vraiment les termes mais, avec la durée de la crise, il viendra bien un temps où nous pourrons reconnaître que le principe du revenu universel s’est imposé avec l’émergence de ce foutu virus venu de Chine (c’est finalement assez peu surprenant… Nous savions déjà toutes et tous que la prochaine révolution viendrait de là!).
Le temps de travail a augmenté.
Les conséquences sur les travailleurs sont énormes et, à ce jour, assez peu maîtrisées. Un niveau de stress inégalé, de réelles difficultés de conciliation de la vie familiale, l’accélération brutale de l’acculturation digitale,… Nous y reviendrons forcément au cours des prochains mois. Il est toutefois une évolution tangible, puissante et délicate, qui touche vraiment celles et ceux qui sont toujours en activité aujourd’hui : le temps de travail effectif a augmenté.
Les plages horaires pendant lesquelles nous travaillons ont une nouvelle fois explosé sous le double effet du travail à domicile et des efforts requis par une situation de crise permanente. Et cela va continuer car il faudra une sacrée dose d’investissement personnel pour retrouver ou maintenir des niveaux de performance économiques proches de ce que nous connaissions au tout début de l’année 2020.
La répartition de la charge de travail n’a sans doute jamais été aussi inéquitable… Et elle repose désormais sur des équipes et des organisations qui se sont habituées à ’tourner’ 24 heures sur 24, 7 jours sur 7… Oui, la gestion du temps de travail doit être repensée d’urgence. Nos organisations, nos outils, nos managers doivent s’adapter à cette nouvelle donne, sans quoi nos collaborateurs s’essouffleront plus rapidement que jamais.
Jean-Paul Erhard, managing partner@Peoplesphere