Editorial – L’exercice du People Management, c’est aussi un combat quotidien contre le sentiment d’injustice.

Prendre des décisions qui concernent l’humain est un art délicat. En effet, il semble quasi impossible de répondre aux attentes des travailleurs, dans une société plus duale et agressive que jamais. Au quotidien dans l’entreprise, les questions qui ‘tendent’ les relations portent entre autres sur la répartition inégale de la charge de travail, la tolérance vis-à-vis de comportements inappropriés, le mépris des règles élémentaires de gouvernance, les écarts de rémunération incompréhensibles… Les People Managers ont notamment pour mission de prévoir et de ‘corriger’ les injustices lorsqu’elles sont patentes. Et de prendre des décisions et initier des actions justes et morales… Pratiquement, cela veut dire quoi?

« Mon manager (RH) est dur, mais juste »… Un grand classique. Vous aussi, vous l’avez déjà entendue cette phrase qui atteste à la fois d’une forme de compréhension vis-à-vis de décisions pas forcément favorables et, en même temps, de la reconnaissance d’une certaine force morale démontrée par un people manager, qu’il soit responsable RH ou pas. Comment compenser les injustices ressenties ou vécues sur le lieu de travail? Comment arbitrer les cas complexes où les indicateurs ne suffisent pas à comprendre les échecs, les freins et même les succès? Voici trois pistes de réflexion à partager et à méditer ensemble.

Egalité ou équité, un débat qui reste d’actualité ?

Les travailleurs ne veulent pas être traités de manière égale. Chacun.e veut être traité.e de manière exceptionnelle.
L’égalité est un mythe, semblable à celui qui voudrait que la gestion RH soit une discipline qui privilégie l’objectivité. Vaste blague… Au mieux, nous pouvons prétendre que nous nous appuyons sur des faits tangibles pour prendre nos décisions. Mais la difficulté de ré-concilier aujourd’hui l’interprétation de ces faits par des personnes qui sont guidées par des idéaux différents est quasi insurmontable. Au point que même un exposé factuel et une analyse mesurée d’événements réels ne parviennent plus désormais à aligner tout le monde sur une lecture commune de la réalité. Quel rôle pour le management dès lors? Construire un dispositif équitable qui puisse évoluer avec le temps, avec les temps forts et les temps faibles, et surtout avec les individus qui s’y inscrivent. Au-delà d’être un art délicat, le people management reste avant tout une vocation de service rendu à autrui.

Conserver une capacité de sanction

Le management est scruté au jour le jour. Il est confronté à des comportements et des situations inacceptables, auxquels il faut réagir. Rapidement. Fortement. Visiblement. Mais il est chargé également de déployer son influence dans un cadre supposé bienveillant et sécurisé. Il importe donc de pouvoir sanctionner durement lorsque c’est nécessaire, afin de protéger les valeurs et aussi de maintenir dans l’expérience collective ce fameux sentiment de justice qui nous permet de nous faire mutuellement confiance. Ce n’est pas le versant le plus ‘populaire’ de la fonction managériale, ni de la fonction RH lorsque le côté obscur de la force doit s’exprimer. Cependant, la capacité de marquer le coup par du feedback négatif ou par une sanction significative doit être préservée. Il s’agit d’un double enjeu de crédibilité… et de justice.

La question inévitable de l’Intelligence Artificielle

L’IA sera-t-elle la solution? Aussi incongru que cela puisse paraître, certains d’entre nous envisagent de confier les décisions et constats objectifs à leurs nouveaux collègues numériques! L’hypothèse tapie dans l’ombre de cette nouvelle tendance est la suivante: puisqu’il est devenu hyper dangereux d’afficher des convictions morales qui rassemblent, autant confier les arbitrages complexes à un tiers que personne ne pourra contester!
Nous n’allons pas ici émettre quelque doute quant à la puissance des outils d’intelligence artificielle qui sont d’ores et déjà à notre disposition. Mais nous devons quand-même nous interroger sur la dé-responsabilisation du management qui confie ses décisions complexes à l’IA qui serait l’incarnation d’une morale irréprochable. L’écriture de ces quelques lignes devrait suffire à générer une profonde angoisse chez nombre d’entre nous…

Les défis moraux ne manquent pas mais puisqu’il faut conclure, nous devons rappeler que nos organisations ont besoin de managers courageux. Nous pourrions ici convoquer les grands justiciers de l’histoire et de l’imaginaire afin qu’ils nous inspirent dans la quête de justice qui vit dans l’entreprise comme dans la société. Robin des Bois, Zorro, les héros de la Résistance hier, ceux de la sauvegarde de l’environnement aujourd’hui… La liste est longue et l’ambition sans doute démesurée d’y voir un jour y figurer l’une ou l’un d’entre nous. Rappelons dès lors, en modestie, que c’est l’addition de chaque micro-combat remporté au nom d’une plus grande justice qui nous aidera à mieux vivre et travailler ensemble. Reste à y prendre notre part.

Jean-Paul Erhard

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