Editorial – Mettre le changement en pause, une option raisonnable pour préserver le bien-être des collaborateurs?

Le cas d’espèce retenu cette semaine nous vient d’Israël. Le gouvernement décide de mettre le changement en pause… En l’occurence, son premier ministre décide de stopper la marche en avant de sa réforme judiciaire, compte tenu d’un constat simple: la société n’est pas en état de la supporter. Ce n’est tout simplement pas le bon moment. Il est rarissime qu’un leader prenne ce type d’initiatives (à replacer dans son contexte politique, c’est clair), ce qui devait forcément susciter notre questionnement ramené à la sphère de l’entreprise.. C’est l’occasion pour nous d’essayer de comprendre si le changement reste une nécessité absolue ou pas. D’essayer de savoir si la stabilité et l’inertie deviennent (ou pas) des valeurs refuges. D’essayer de réfléchir ensemble aux moyens de survivre dans cet univers de plus en plus contradictoire…

L’étude récente publiée par la société d’analyse de marché Gartner tend à démontrer que la transformation numérique, l’adoption de nouveaux modes de travail ainsi que les réorganisations des équipes soumettent les travailleurs à un rythme de perturbations qui provoque tout simplement l’épuisement. Les plans d’accompagnement ne suffisent plus. La fatigue du changement est là, et bien là! Et elle réduit sans surprise nos capacités à prendre de bonnes décisions, à résoudre des questions complexes voire même à communiquer. D’où vient cette lassitude visiblement bien réelle?

La fin d’un modèle ?

« La seule constante, c’est le changement… » Cette phrase définitive a-t-elle encore un sens aujourd’hui? Nous avons déjà évoqué ici, il y a quelques mois, le droit à la paresse dont le retour pourrait sonner la fin d’une ère. Le changement comme vecteur de progrès serait-il en train de perdre son statut d’indéboulonnable? C’est un raisonnement similaire à celui qui prône la décroissance comme une nécessité dans notre quotidien. Ce que nous, collectivement, mettons en cause est le caractère ‘évident’ du changement dans notre mode de fonctionnement. Au fond, ceci n’est pas très surprenant à l’ère de la contestation systématique. Cela fait bouger quelques lignes bien sûr. Mais que nous puissions considérer que la transformation, vécue comme un principe fondateur de bonne gestion de l’entreprise, puisse être remise en question, ce n’est pas un scandale! Peut-être moins verrons-nous d’un bon oeil à l’avenir de récompenser celles et ceux qui veillent à préserver la tradition.

Changement perturbateur, changement libérateur… Quelle différence?

Puisque c’est de cela dont il est question, il faut souligner que la transformation de nos entreprises ne génère pas que des traumatismes. Mal géré, il est vrai qu’elle peut susciter de l’angoisse et, dans certains cas même, de la souffrance. De la frustration aussi lorsque les inconvénients qu’elle charrie sont manifestement plus nombreux que les petits bénéfices qui en découlent. Mais le changement peut aussi donner naissance à une vague d’enthousiasme lorsqu’il est conçu et mis en oeuvre via le prisme de son impact concret sur les personnes qui en sont la cible. La notion d’impact sur notre réalité quotidienne est importante, cela va de soi. Au-delà, ce que nous pouvons observer, c’est surtout la sensation d’être partie prenante du changement qui va déterminer notre relation à celui-ci. Subir transformation sur transformation devient intolérable. Non seulement pour l’intranquilité que cela provoque, mais aussi pour le rapport de domination que cela installe.

Tout le monde peut se tromper !

Dans le monde de l’entreprise aujourd’hui, être un bon manager implique que l’on puisse à la fois se montrer exigeant et indulgent, que l’on développe auprès des collaborateurs à la fois la quête de la performance et le droit à l’erreur. Mais il faut un peu plus que la bienveillance ‘classique’ pour considérer quel tel ou tel projet n’était tout simplement pas une bonne idée et qu’il est opportun dès lors de le mettre en pause.
Pourquoi? En l’occurence, c’est d’une erreur managériale dont il s’agit. Cela déconstruit le mythe du manager omniscient qui reste bien vivace, malgré l’émergence de concepts tels que la vulnérabilité du leadership ou la complexité à produire du consensus. Désormais, mieux vaut ne jamais évacuer la possibilité d’une erreur, malgré nos positions de pouvoir et la hauteur de nos responsabilités. Et ce, même si cela reste contre-intuitif dans des environnements qui cultivent la persévérance et l’hyper-compétence au rang de valeurs cardinales.

Nous avons donc, toutes et tous, le droit d’être fatigués du changement. Un défi supplémentaire pour nos managers de terrain… Réussir à sentir dans notre environnement lorsque les conditions sont réunies pour transformer ou pas est un exercice délicat. Cela concerne sans doute en premier lieu notre capacité à mesurer l’état de santé, physique et mentale, des troupes. Mais cela vise aussi notre aptitude à obtenir l’adhésion, ce qui peut s’avérer un peu plus complexe.
En effet, nous savons en effet à quel point nous sommes capables de repousser nos limites individuelles, pour nous confronter à de nouveaux standards de performance et de résistance. Par contre, ce que nous maîtrisons moins bien peut-être, c’est la manière dont le changement modifie notre rapport au collectif et à ses processus de décision. Une piste de réflexion pour le futur ?

Jean-Paul ERHARD

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