Est-ce concevable aujourd’hui encore? Manifestement oui! Selon une étude de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, publiée prochainement, 3 travailleuses sur 4 ont été confrontées à au moins une forme de discrimination, préjudice, inégalité de traitement et tensions au travail sur base de leur grossesse ou maternité. 22% des travailleuses enceintes ont été confrontées à des discriminations directes et 69% ont subi de la discrimination indirecte. Autant de constats qui ont poussé l’Institut à lancer une nouvelle campagne de sensibilisation intitulée « Maman reste à bord ».
Les discriminations liées à la grossesse et la maternité s’apparentent à de la discrimination fondée sur le sexe. De pareilles pratiques discriminatoires sont courantes. De plus, peu de femmes osent faire respecter leurs droits, ayant souvent elles-mêmes intégrées les stéréotypes de genre et acceptées l’idée que la grossesse et la maternité sont des freins pour leur carrière.
« La grossesse est encore perçue comme une mauvaise nouvelle au travail, » explique Michel Pasteel, Directeur de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes. « D’un côté, la travailleuse se sent par exemple souvent en situation de stress à l’annonce de la nouvelle auprès de son employeur et culpabilise tout au long de sa grossesse ou à son retour de congé de maternité pour avoir ‘pris des vacances’. D’un autre côté, certains employeurs et collègues ne manifestent aucun soutien à la travailleuse enceinte, ne remplissent pas un certain nombre d’obligations légales pour la protection de la travailleuse et de son enfant (analyse de risques, respect des droits de la travailleuses, etc.), voire même lui font subir un traitement désagréable, inégal, du harcèlement et/ ou la discriminent. »
Cette campagne fait écho aux premiers résultats d’une nouvelle étude de l’Institut Grossesse et maternité au travail. Les expériences des candidates, des travailleuses et des indépendantes en Belgique.
Ils font état des constats suivants :
1. La moitié des femmes enceintes qui cherchent effectivement du travail ne se portent pas candidates. Une sur trois pense que ce serait de toute façon inutile.
2. Une candidate sur cinq mentionne toujours qu’elle est enceinte dans ses lettres ou e-mails de candidature.
3. Une femme sur quatre a envisagé de démissionner pendant sa grossesse, son congé de maternité ou après son retour au travail. Pour 40% d’entre elles, l’amélioration de la conciliation entre vie professionnelle et vie privée constituait la raison principale. Pour 15% d’entre elles, les raisons principales étaient la dégradation des relations avec leur chef-fe, la pression les poussant à démissionner ou les collègues.
4. Plus de la moitié des femmes signalent qu’aucune analyse de risques n’a été effectuée.
5. 46% des travailleuses estiment même qu’il existe, dans leur fonction, un risque pour la sécurité et la santé des femmes enceintes, des femmes qui allaitent ou des bébés.
6. Pour près d’une travailleuse sur cinq, le droit au congé de maternité n’est pas respecté.
7. 21% des travailleuses enceintes ont été confrontées à des tensions au travail suite à leur grossesse.
8. Si l’on ne tient pas compte des analyses de risques non effectuées, les travailleuses enceintes sont encore 48% à avoir été confrontées à une forme de discrimination.
Ces résultats corroborent les constats de l’Institut quant aux signalements qu’il reçoit au sein de son service juridique. En 2016, la grande majorité des discriminations liées à l’emploi signalées à l’Institut émanent de femmes (69%). De ce fait, 38% des signalements en matière d’emploi concernent la discrimination relative à la grossesse et à la maternité. Les femmes sont systématiquement discriminées à tous les stades du processus de mise à l’emploi : du recrutement et de la sélection à la non-prolongation de leur contrat à durée déterminée ou leur licenciement, en passant par leur condition d’emploi. Au fil des années la part de signalements relatifs à la grossesse et la maternité dans l’emploi est restée stable, mais l’Institut reçoit de plus en plus de signalements dans le domaine de l’emploi, et donc inévitablement aussi concernant la grossesse et la maternité.
Déculpabiliser les femmes.
Avec le slogan accrocheur « Nous sommes heureux de vous annoncer la naissance de Emma. Au boulot ils le sont moins.», l’Institut souhaite sensibiliser les femmes enceintes, en ou au retour du congé de maternité, et aussi les femmes qui envisagent de devenir maman au fait qu’elles n’ont pas à être discriminées, rejetées ou harcelées, en raison de leur grossesse ou maternité et qu’elles ont des droits. L’objectif de la campagne vise à faire déculpabiliser les travailleuses face à la situation de discrimination dont elles sont victimes et à les inciter à s’informer et déposer un signalement auprès de l’Institut, via le numéro vert 0800/12.800.
Cette campagne s’étalera sur une période de trois mois et comprend des affiches, une carte postale, un dépliant de sensibilisation et un guide d’information Grossesse au travail. Guide pour la travailleuse et l’employeur pour un traitement sans discrimination. Ce matériel promotionnel sera diffusé, entre autres, via la boîte rose, les hôpitaux, les mutualités, auprès des gynécologues et médecins, des centres de fécondation in vitro, etc. Enfin la campagne se déclinera aussi sur les réseaux sociaux, Facebook et Instagram.
Plus d’informations sur le site www.mamanresteabord.be.