Coup d’envoi de la Conférence internationale du Travail: le droit à la sécurité et à la santé au travail deviendra-t-il une norme universelle?

La conférence de l’Organisation internationale du Travail (OIT) a commencé à Genève. Son principal objectif consiste à faire du droit à la sécurité et à la santé au travail, une norme de travail universelle. Autre fait marquant : la Hongrie est appelée à venir se justifier sur ses manquements en matière de respect du droit du travail.

Fondée en 1919 sur les ruines de la Première Guerre mondiale, l’Organisation internationale du Travail célébrait son centenaire en 2019. De quoi donner un nouvel élan à l’Organisation, après une période difficile. En particulier après que le banc patronal l’a plongée dans une crise sans précédent en lui refusant le droit de prendre des mesures contre les violations du droit de grève, qui fait pourtant partie des normes fondamentales du travail.
Et puis est arrivée la crise sanitaire. Avec toutes les difficultés à rassembler des personnes du monde entier. La conférence de 2020 a été annulée. En 2021, étalée sur le printemps et l’automne, la conférence n’a été organisée que sous forme digital.

Construire des droits universels du travail

La cerise sur le gâteau (d’anniversaire) en 2019 a été la « Déclaration du centenaire » sur l’avenir du travail, soigneusement préparée par une commission spéciale dont faisait partie Luc Cortebeeck, président honoraire de la CSC. Cette commission a lancé le concept de la garantie universelle du travail : tout travailleur, où qu’il soit dans le monde, devraient avoir droit à un salaire adéquat, à une limitation de la durée du travail et à la sécurité et la santé au travail. L’objectif était d’ajouter ces trois droits à l’ensemble des normes fondamentales du travail de l’OIT. Aujourd’hui, cet ensemble se limite à l’interdiction du travail des enfants, du travail forcé et de la discrimination, ainsi qu’à la liberté syndicale et au droit à la négociation collective (notamment le droit de grève).

La valeur ajoutée de cette reconnaissance en tant que norme fondamentale du travail est que tous les pays qui adhèrent à l’OIT doivent respecter ces droits, même s’ils n’ont pas ratifié ces conventions de l’OIT. Par ailleurs, le contrôle est durci si ces droits sont violés.

Les syndicats ont adhéré à la proposition de la Commission. Les employeurs, également représentés au sein de la Commission, ont estimé que le projet était trop ambitieux. Dans le cadre de la Déclaration du centenaire, ils ont néanmoins concédé une ouverture pour l’un de ces trois droits : la sécurité et la santé au travail. Trois ans plus tard, cette question est à nouveau inscrite à l’ordre du jour, afin de passer officiellement le cap de la reconnaissance en tant que norme fondamentale du travail.

Pays sur la sellette (notamment la Hongrie)

La CSC a traditionnellement joué un rôle de pionnier dans l’une des commissions permanentes de la Conférence : la commission de l’application des normes. Le président Marc Leemans y est le porte-parole du groupe des travailleurs depuis des années. Il s’agit d’une sorte de tribunal où doivent comparaître les pays qui bafouent les normes internationales du travail. Les pays suivants doivent se justifier : Hongrie, Azerbaïdjan, la Biélorussie, le Bénin, la République centrafricaine, la Chine, Djibouti, l’Equateur, le Salvador, les Iles Fidji, le Guatemala, l’Irak, le Kazakhstan, le Liberia, la Malaisie, le Malawi, le Myanmar, l’Ile Saint-Martin, la Nouvelle-Zélande, le Nicaragua, le Nigeria et les Iles Salomon.

Comme de coutume, cette commission commence par discuter d’un rapport d’experts sur un sujet spécifique. Cette fois, ce rapport traite des personnels soignants, certains des héros de la crise sanitaire. Sans oublier le groupe souvent sous-exposé des travailleuses et travailleurs domestiques. L’objectif est d’évaluer le suivi de la convention de l’OIT sur le personnel soignant (n° 149) et de la convention plus récente sur les travailleuses et travailleurs domestiques (n° 189).

Travail après la crise sanitaire

Autre commission permanente : celle de la « discussion récurrente ». Cette commission a été créée sur la base de la déclaration de l’OIT sur la Justice sociale de 2008. Cette déclaration définit quatre objectifs stratégiques pour le travail de l’OIT : le travail décent, la protection sociale, le dialogue social et le respect des normes fondamentales du travail. Chaque année, l’un de ces quatre thèmes est abordé, et ce thème est ensuite au centre des travaux ultérieurs de l’OIT. Cette année, c’est au tour de l’emploi, dans un monde où les marchés du travail ont été fortement secoués par la crise sanitaire. Sans oublier la crise ukrainienne. Nous en ressentons aujourd’hui les conséquences énormes pour l’Europe et pour notre pays. Une telle conférence nous oblige cependant à ouvrir nos esprits et à prendre en compte les conséquences désastreuses pour le Sud et l’Est. Dans son rapport pour la Conférence, Guy Ryder, le Directeur général sortant de l’OIT, a attiré l’attention sur l’impact de ces crises sur les pays les moins développés. Avec la hausse mondiale des prix de l’énergie et des denrées alimentaires, le pire risque encore d’advenir dans ces pays.

Normes pour les apprentissages

En Belgique comme dans le monde entier, nous voyons comment les apprentissages et la formation sur le lieu de travail sont mis à profit dans les processus d’apprentissage des jeunes. Nous constatons toutefois aussi qu’ils font trop souvent l’objet d’abus en tant qu’emplois à bas coût.

Lors de la conférence de 2012, dans un débat sur le chômage des jeunes lié à la crise financière de 2008, le gouvernement a été invité à apporter de meilleures garanties qu’il s’agit de parcours d’apprentissage à part entière et non d’un moyen commode de remplacer des travailleurs ordinaires. L’objectif est d’aller plus loin et d’instaurer une nouvelle norme de l’OIT pour ce type de formation sur le lieu de travail.

 

Source : CSC

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