Sous le double effet du travail temporaire généralisé et d’une pyramide des âges qui s’annonce catastrophique, le secteur des soins de santé est confronté à un flux massif des effectifs au sein de ses entreprises. L’analyse des mouvements in/out semble montrer que 25% des effectifs sont ‘renouvelés’ chaque année. De quoi questionner les organisations du secteur sur leur politique de rétention et d’attraction des talents.
Selon les chiffres du groupe Acerta, en 2017, un travailleur des soins de santé sur quatre quittait son employeur. Du moins, sur l’ensemble de tous les contrats. Le flux entrant moyen dans le secteur des soins s’élève à 27 %, soit 2 % de plus que le flux sortant, mais ceci est insuffisant pour contrebalancer le renversement de la pyramide des âges dans le secteur.
« Le flux sortant de 25 % concerne tous les contrats du secteur des soins de santé. Sachant que près d’un collaborateur des soins de santé sur sept travaille sous un contrat temporaire, ce pourcentage élevé n’est pas étonnant. Un service RH d’un hôpital ou d’une institution médico-pédagogique est donc continuellement à la recherche de personnel. Si nous nous concentrons sur les contrats à durée indéterminée, le flux sortant s’élevait à 9 % en 2017, la mobilité professionnelle est donc très faible. Trouver les bons talents devient par conséquent de plus en plus difficile dans ce secteur », explique Benoît Caufriez, Directeur chez ACERTA Consult.
13 % des travailleurs sortent de service pour prendre leur pension
Un examen approfondi de la manière dont les contrats à durée indéterminée sont terminés nous apprend que l’employeur ne met un terme au contrat que dans 14 % des cas. Il est également surprenant que 13 % des travailleurs sortent de service parce qu’ils atteignent l’âge légal de la pension et que seuls 3 % d’entre eux optent pour le RCC. Dans 28 % des cas, c’est le travailleur qui met un terme au contrat de travail. Dans pas moins de 37 % des cas, la collaboration cesse d’un commun accord. Nous pouvons ainsi partir du principe que la demande de mettre un terme au contrat de travail émane presque toujours du travailleur. Il est donc possible d’en conclure que dans la grande majorité des cas, la décision de partir est prise par le travailleur.
« Une réflexion active sur une politique de rétention est donc une priorité absolue pour le secteur des soins. Pas seulement pour éviter que les travailleurs ne partent parce qu’ils pensent que l’herbe est plus verte ailleurs, mais aussi pour rendre le fait de devoir travailler plus longtemps envisageable pour tout le monde. Tenir compte des talents et souhaits des travailleurs et s’en inspirer pour trouver des opportunités au sein de l’organisation, pour que les deux parties – le travailleur et l’employeur – y trouvent leur compte, c’est le point de départ d’un ‘Rematching’ réussi ».
Insuffisant pour contrebalancer le vieillissement
Le flux entrant moyen pour tout le secteur s’élève à 27 %, soit 2 % de plus que le flux sortant : insuffisant donc pour fournir les travailleurs actifs nécessaires pour combattre le vieillissement dans le secteur. Au sein même du secteur, d’importantes différences se dessinent, avec la garde d’enfants qui sort du lot avec 84 % (et un flux sortant de 77 %). Seuls les services d’éducation et d’hébergement enregistrent un flux entrant inférieur au flux sortant. L’introduction de la nouvelle législation sous la forme du budget d’assistance personnel pour les moins-valides peut expliquer certains éléments. Cette nouvelle législation pousse les moins-valides à se reposer sur des solutions alternatives pour leur accueil dans un établissement.
En pleine guerre des talents.
Ce chiffre moyen de 25 % cache de nombreuses différences. Ainsi, le flux sortant pour les contrats à durée indéterminée n’est « que » de 9 % par rapport à un afflux de 8 %.
Soyons donc clairs : la raison principale au flux (entrant et sortant) dans le secteur des soins a trait au fait que ce secteur travaille énormément avec des contrats à durée déterminée ou des contrats de remplacement.
En guise de comparaison : le secteur marchand connaît un flux sortant de 12 % par rapport à un flux entrant de 13 % en ce qui concerne les travailleurs avec un contrat à durée indéterminée.
Ce seul chiffre pour le secteur des soins cache des différences cruciales entre les divers sous-secteurs. Ainsi, le secteur des services d’éducation et d’hébergement peut compter sur un flux annuel entrant de pas moins de 33 % (11 % des travailleurs sont occupés avec un contrat à durée indéterminée) et un flux sortant similaire (33 % et 9 %). Le secteur hospitalier compte une population de travailleurs bien plus stable : le flux entrant s’élevait à 15 % en 2017 et le flux sortant à 14 %. En ce qui concerne les contrats à durée indéterminée, le flux entrant comme sortant est limité à 5 %.
Le secteur des personnes âgées, pourtant en certains points comparables au secteur hospitalier, connaît un flux beaucoup plus important : en ce qui concerne les travailleurs avec un contrat à durée indéterminée, le pourcentage sortant s’élève à 11 % alors que le pourcentage des travailleurs entré en service en 2017 avec un contrat à durée indéterminée correspondait à 12 %. Toutefois, il ne fait aucun doute qu’un flux moyen d’un sur quatre devrait inquiéter les employeurs.
La reconnaissance de diplômes équivalents stimule le flux entrant
91 % des membres du personnel employés dans le secteur est de nationalité belge. Le top trois des autres pays d’origine dans le secteur des soins : les Pays-Bas, la France et le Maroc. En guise de comparaison : dans le secteur marchand, 80 % des travailleurs sont belges. Ce pourcentage ne reflète toutefois pas l’ensemble de la diversité du secteur, parce qu’il n’est pas tenu compte des Belges allochtones.
« Le faible pourcentage des autres nationalités occupées dans le secteur des soins pourrait être lié aux diplômes. Vous avez besoin d’un diplôme reconnu pour pouvoir travailler dans ce secteur en Belgique. La certification de diplômes équivalents est donc un point à travailler et peut être une façon d’améliorer le flux entrant. »